Théosophes et Théosophistes(*)
La France Antimaçonnique a publié, le 3 juillet dernier (pp. 318 et suivantes), une lettre de M. P. Verdad-Lessard. La Revue Internationale des Sociétés Secrètes, dans son numéro du 5 septembre (pp. 3117-3119, 3119-3120, 3148 et 3154-3155), en reproduit plusieurs passages, relatifs au Gnosticisme, au Martinisme, au Spiritisme et à la Théosophie.
Sur ce dernier sujet, il était dit que « les Théosophes datent en France de 1878 ». La Revue ajoute à ce propos : « Signalons, en passant, l’erreur dans laquelle tombe M. Verdad-Lessard, erreur commune à beaucoup de ceux qui s’occupent du mouvement théosophique actuel. Il y avait des Théosophes en France bien avant la fondation de la Société Théosophique par Mme Blavatsky et le Colonel Olcott. »
Cela est vrai, en effet, s’il est question de Théosophes au sens primitif du mot ; mais l’erreur vient peut-être justement de ce que l’on confond trop ces Théosophes avec les Théosophistes, en comprenant sous cette dernière désignation tous ceux qui se rattachent au mouvement dit théosophique, qui prit naissance à New-York. Cette distinction est toujours faite en anglais, et elle nous paraît assez importante pour qu’il soit nécessaire de la maintenir également en français. On peut éviter ainsi d’assez graves méprises, car il serait certainement absurde, par exemple, de vouloir rattacher, même de loin, les doctrines de la Société Théosophique actuelle à celle des Illuminés Théosophes du xviiie siècle.
« Il y a des Théosophes indépendants de cette Société. Et celle-ci peut sombrer dans la crise qu’elle traverse en ce moment sans entraîner avec elle dans cette chute la Théosophie. »
Si l’on ne veut parler que de la Société Théosophique dirigée par Mme Besant, il y a même, nous l’avons déjà vu, des Théosophistes, au sens strict du mot, qui en sont indépendants, tout au moins depuis quelque temps. Mme Catherine Tingley en Amérique, M. Rudolf Steiner en Allemagne, M. Édouard Schuré en France, sont de ce nombre avec leurs disciples ; il en existe aussi en Italie, en Suisse, etc. Il est probable qu’il y en aura de plus en plus, l’autorité d’Adyar étant bien ébranlée par les récents événement.
La Revue continue : « C’est pourquoi ce serait une grave faute de tactique, pour tous ceux qui veulent combattre les sectes de la Contre-Église, de borner leurs études au mouvement théosophique né du Néo-Bouddhisme de Mme Blavatsky. »
Assurément, mais il n’en faut pas moins étudier aussi ce mouvement, où le Néo-Bouddhisme se trouve d’ailleurs mêlé à bien d’autres éléments des provenances les plus diverses, et dont les origines vraies ne seront jamais trop bien connues. En outre, cette étude a une portée beaucoup plus étendue que ne pourrait le supposer un observateur trop superficiel, en ce sens qu’elle est peut-être une de celles qui permettent le mieux de se rendre compte de certaines tactiques et de certains procédés.
Notre confrère termine en ces termes : « Il y a autre chose dans la Théosophie, et j’ajouterai que cet autre chose est bien plus dangereux et redoutable pour les âmes qui en sont dupes. »
Quel est cet autre chose qui n’est pas plus clairement désigné ? Serait-ce une allusion à l’ésotérisme helléno-chrétien dont M. Édouard Schuré s’est fait le promoteur ? Cette doctrine nous paraît assez dangereuse en effet, puisque nous voyons son auteur, après être allé du Sphinx au Christ, ne pas s’en tenir là et se promettre d’aller (c’est lui-même qui l’annonce)… du Christ à Lucifer !
Quoi qu’il en soit, espérons que, pour nous fixer sur ce point, on nous donnera bientôt quelques précisions : pourquoi hésiterait-on à dénoncer nettement un semblable danger ?