CHINE
Sun Yat Sen contre Yuan Shi
Kaï(*)

La comédie du F/ protestant Sun Yat Sen paraît toucher à sa fin, à moins qu’elle n’entre simplement dans une phase nouvelle.

Les fidèles de ce chef (?) du parti jeune-chinois, révoltés contre le gouvernement de Yuan Shi Kaï, sont en pleine défaite. Dans la région de Shanghaï, d’après un télégramme de Pékin, les troupes gouvernementales leur ont tué 200 hommes. Une autre dépêche d’agence, datée de Shanghaï, annonce que les forts de Wu-Sung, où s’étaient retranchés les rebelles, se sont rendus.

Néanmoins, du Japon où il s’est prudemment réfugié, le F/ Sun Yat Sen vient d’adresser à Yuan Shi Kaï une lettre où il le somme une dernière fois de démissionner. Il l’accuse d’avoir fait verser le sang des innocents pour conserver le pouvoir et de s’être montré plus impitoyable que l’ancienne monarchie. Il termine en ces termes : « Si vous refusez de vous rendre à mon sage conseil (!), j’adopterai contre vous la tactique que j’ai employée contre la monarchie absolue. Je suis désormais décidé ; ceci est mon dernier mot, et j’espère que vous le prendrez en considération. »

Mais ces menaces non déguisées paraissent n’avoir produit que fort peu d’impression, car on considère à Pékin que la réélection de Yuan Shi Kaï comme président est assurée.

Cette issue était facile à prévoir pour quiconque sait ce que fut en réalité la récente révolution : tous les Chinois souhaitaient le renversement de la dynastie usurpatrice et des gouvernants mandchous, et attendaient, assez patiemment du reste, l’occasion favorable qui devait permettre à cet événement de s’accomplir ; le mouvement jeune-chinois fut cette occasion, et rien de plus. On le vit bien lorsque le F/ Sun Yat Sen fut mis à la tête du gouvernement provisoire, ce qui signifiait clairement que, dès l’installation du nouveau gouvernement régulier, son rôle serait terminé ; tant pis pour lui et pour ses partisans si, se croyant assurés de certains appuis étrangers, ils n’ont pas voulu le comprendre.

D’ailleurs, il faut dire que, même parmi les républicains et soi-disant tels, le F/ Sun Yat Sen était loin de jouir de toute l’autorité d’un véritable « chef de parti » ; la plupart témoignaient plutôt quelque mépris pour ce docteur américain, profondément ignorant des choses de la Chine. Il fallait que cette ignorance fût bien grande, en effet, pour que ce tribun se mît en tête qu’il allait sérieusement bouleverser des institutions plusieurs fois millénaires, restées debout à travers tant de révolutions déjà passées, et pour qu’il se crût prédestiné à la mission de réformateur, au point de vouloir tout d’abord réaliser cette idée vraiment extravagante : abolir l’usage des antiques caractères idéographiques, et les remplacer par un alphabet artificiel, calqué sur ceux de l’Occident. Avec l’adoption du judéo-maçonnique espéranto comme « langue auxiliaire », à l’instar du Japon, c’eût été complet ! Malheureusement, c’était vouloir aller un peu trop vite, surtout quand on a affaire à des gens pour qui le temps est fort peu de chose, et qui ne se soucient guère des derniers progrès de la vapeur et de l’électricité. De plus, la réforme proposée avait le tort grave, et non prévu, d’aller à l’encontre d’une question de principe, et elle était tout simplement de nature à soulever contre son auteur la légitime indignation de tous les vrais Chinois.

Quand on assiste à des choses de ce genre, on comprend pourquoi les Sociétés secrètes ultra-traditionalistes de l’Extrême-Orient ne consentiront jamais à entrer en relations avec la Maçonnerie occidentale, sous quelque forme que ce soit. Elles considéreront toujours comme les derniers des profanes ces Jeunes-Chinois qu’elles savent soumis à l’influence du Protestantisme et de sa fidèle alliée, la Maçonnerie anglo-américaine ; elles les regardent avec dédain, peut-être avec pitié, à peu près comme les Musulmans attachés à leurs traditions regardent les Jeunes-Turcs « libres-penseurs » (?) et enjuivés, affiliés à la Maçonnerie latine.

Les Chinois se souviennent aussi de la part qu’eurent, dans la genèse de certaine guerre encore récente, les intérêts du Protestantisme et les influences qu’il sait mettre en jeu, comme ils se souviendront longtemps, avec un sentiment tout autre que de la gratitude, de la pression extérieure qui leur a imposé la façade constitutionnelle et républicaine.

Pour avoir été en rapport avec le F/ Sun Yat Sen, certain F/ français, ancien parlementaire bien connu dans le monde colonial, se croit de bonne foi, paraît-il, l’inspirateur de la révolution chinoise. C’est là, de sa part, bien de la naïveté ; il doit pourtant savoir que ce n’est pas en France que le leader jeune-chinois et protestant trouva l’argent nécessaire à sa propagande. Il en trouva ailleurs, en effet ; mais ses commanditaires continueront-ils à le soutenir, maintenant qu’il s’est irrémédiablement compromis aux yeux de ses compatriotes ? That is the question !