Un Initié
des Sociétés Secrètes supérieures
(1753-1814)
« Franciscus,
Eques a capite
galeato »(*)(1)

Un livre d’une grande importance au point de vue antimaçonnique a paru la semaine dernière à la librairie la Renaissance Française. Il est écrit par un nouveau venu,
M. Benjamin Fabre, et ce nouveau venu débute par un coup de maître. Il nous livre en effet une admirable collection de documents authentiques émanant de l’un des hauts initiés qui préparèrent la Révolution et qui travaillèrent ensuite invisiblement sous le Premier Empire, alors que le maître de la France croyait la vie maçonnique concentrée toute entière dans les Loges où l’avaient fait entrer ses officiers. Il s’imaginait tenir ainsi la Maçonnerie. En réalité, il n’en tenait que le vêtement. De ce vêtement il faisait son jouet, sans se douter que, malgré toute sa puissance, lui-même était le jouet de ce dont la Maçonnerie n’est que l’enveloppement.

M. Benjamin Fabre ne nous donne que le prénom et le surnom maçonnique du héros de son livre. Franciscus, François ; Eques a capite galeato, le chevalier à la tête casquée. Quant au nom de famille, il ne veut pas le prononcer ; et c’est par un sentiment très louable. Il existe encore, en effet, des descendants d’Eques a capite galeato. C’est l’un de ces descendants qui a remis à M. Benjamin Fabre les documents qu’il lui a donné mission de livrer au public pour réparer autant qu’il est possible le mal que son aïeul a contribué à faire. C’est là un très noble exemple qu’il serait à souhaiter de voir suivi. M. Copin-Albancelli, qui a écrit la préface du livre de M. Benjamin Fabre, dit à ce sujet :

« Il existe certainement dans plus d’une famille des archives qui permettraient de jeter enfin une pleine lumière sur la Franc-Maçonnerie, de montrer les liens qui l’unissent aux autres Sociétés secrètes et de faire comprendre par toute l’élite de la nation l’espèce particulière de dangers auxquels les peuples modernes sont exposés. Les familles nobles ont été les premières à se laisser prendre au piège maçonnique. Il appartient à leurs représentants actuels de réparer cette faute, souvent inconsciente, en fournissant aux générations d’aujourd’hui les renseignements qui peuvent les aider à échapper aux conséquences créées. Les services qu’ils rendraient ainsi seraient certainement précieux. On ne saurait douter en effet que les Puissances occultes ne prennent toutes les mesures possibles pour faire disparaître des archives publiques tout ce que les chercheurs y trouveraient de documents vraiment révélateurs sur le mécanisme des Sociétés secrètes. C’est pourquoi nous devons être d’autant plus reconnaissants aux hommes de grand cœur et de haute intelligence qui veulent bien ouvrir aux spécialistes le trésor de leurs archives familiales. »

Mais il aurait pu arriver que le descendant de la très noble et vieille famille à laquelle appartenait Eques a capite galeato remit les documents en sa possession à un homme insuffisamment instruit des choses de la Maçonnerie. Il en a été tout autrement. M. Benjamin Fabre s’est formé à l’école de Barruel et de Crétineau-Joly. Il a admirablement compris la théorie de M. Copin-Albancelli sur les sociétés superposées, théorie qui est combattue par certains antimaçons, on ne sait trop pourquoi. Les sociétés superposées existent en effet. Il est impossible de le nier puisque c’est un fait. Les antimaçons dont nous parlons affirment que ce fait est sans importance. Mais alors, comment expliquer qu’il soit si persistant ? Les adversaires de la théorie des sociétés superposées ne répondent pas à cette question, et pour cause.

M. Benjamin Fabre, lui, ne s’y est pas trompé. Aussi, à la lumière de l’idée directrice que lui a fourni la thèse de M. Copin-Albancelli, il a su tirer un merveilleux parti des précieuses archives qui lui furent confiées.

À cause de cela, son livre présente un double intérêt. Il se recommande par l’origine et l’importance des documents qu’il verse à l’arsenal de guerre antimaçonnique et il peut contribuer puissamment à aider les Français à échapper aux pièges qui leur sont journellement tendus.

« L’ouvrage de M. Benjamin Fabre, écrit M. Copin-Albancelli en terminant sa préface, fortement pensé et supérieurement conduit, doit prendre place à côté de ceux de Barruel et de Crétineau-Joly. C’est le plus bel éloge qu’on en puisse faire ».

Nous avons tenu à indiquer dès aujourd’hui ce livre à nos lecteurs. Nous y reviendrons tout à loisir.

Le Liseur.