Quelques documents inédits
sur l’Ordre des Élus Coëns
(suite)(*)

5e Instruction
du Vendredy 21 Janvier 1774

À l’entrée du Temple de Salomon étaient deux colonnes égales de 18 coudées de haut. Celle de droite se nommait Jak.(1), qui signifie il établira ; celle de gauche se nommait Bo.(2), qui signifie confusion(3) ; la première faisait allusion à l’incorporisation de l’homme dans son corps de nature, la seconde à celui de la femme. Elles étaient égales parce que l’être spirituel mineur de l’homme et de la femme ayant la même origine, la même émanation, ils sont égaux et ont le même acte à remplir. Elles se divisaient en trois parties, savoir : 10-4-4. Ce qui représente dans 10 la correspondance du mineur avec la Divinité, de la circonférence au centre ; dans 4, de la surface terrestre à la partie céleste, et par l’autre 4, de la partie céleste à celle surcéleste.

Le mot Jak., il établira, annonce, la puissance de commandement qui était réservée à l’homme dans son principe. Le mot Bo., confusion, exprime celle qui a résulté de la prévarication du premier homme qui fut une répétition de celle des premiers Esprits qu’il devait contenir, molester, et pouvait seul leur servir d’intellect bon, et par sa communication avec eux leur inspirer le repentir, et dès lors faire cesser le mal ; mais entraînant l’homme ils se sont privés de cette unique ressource.

L’homme malgré sa chûte a toujours la même œuvre à remplir, pour laquelle il a été destiné, et doit par conséquent travailler à la Réconciliation, seul moyen de réacquérir ses trois puissances sur l’Ouest, Nord et Sud, qui figure le terrestre, céleste et surcéleste, et de se remettre en correspondance avec son quaternaire, molester sans cesse les esprits pervers en se refusant à leurs pièges, en détruisant sans cesse leurs projets méchans, et enfin reprendre sur eux l’autorité qui leur était réservée, parce que si la miséricorde divine veut jamais opérer quelque Bien en leur faveur, ce sera par la seule communication de l’homme avec eux qu’ils pourront en concevoir le désir, puisque l’homme a été établi à cette fin et que les décrets immuables de Dieu doit avoir son accomplissement. L’homme qui leur livre sa volonté contrarie l’œuvre des desseins du Créateurs et renonce autant qu’il est en lui à sa destination première ; par la jonction de volonté et d’action qu’il fait avec leur chef, il devient un avec luy et devient inférieur à luy et son sujet ; il est muni d’un intellect démoniaque pour séduire et pervertir ses semblables par son exemple, et se rend plus coupable qu’eux-mêmes et doit par conséquent s’attendre à un sort pire que le leur, puisqu’il renforce le parti qu’il a charge de détruire.

Le nombre de confusion de la seconde colonne est désigné par le rang binaire que tient la première lettre du mot Booz dans l’Alphabet hébraïque.

Ces deux colonnes avaient encore une autre application, celle du midi désignait l’âme de l’homme ou le mineur, celle du nord l’esprit Bon qui lui est donné pour le diriger ; si la partie du midi dans la Création universelle est celle où les esprits pervers sont plus spécialement relégués, celle du Nord doit être habitée par des êtres capables et chargés de les contenir, ce que l’Écriture Sainte donne souvent à entendre soit en parlant du Démon de Midy, soit en parlant de l’Esprit Saint qu’elle fait toujours venir du côté de l’Aquilon(4).

Ces choses avaient été de même figurées par les deux colonnes, l’une de pierre ou de brique, qui avait été élevée dans la partie du Nord par la postérité de Seth, l’autre par celle de terre qui avait été élevée dans la partie du midi par celle de Caïn. La première annonçait la force et la subtilité des œuvres spirituelles. Bonne, elle résista aux inondations du Déluge et fut conservée longtems après. L’autre annonçait la faiblesse et la corruption des œuvres de matière, ce qui était même désigné par le nombre de confusion de ses proportions. Aussi fut-elle totalement détruite par les eaux du déluge.

Il était défendu aux enfans de Dieu de s’allier avec les enfans des hommes(5). Cette défense ne doit point s’entendre matériellement. Les hommes de ce tems ne pouvant se multiplier que selon les loix physiques de la nature à laquelle ils étaient assujettis comme tous les autres animaux, devaient être libres de s’allier indistinctement avec les femmes des deux races ; mais il était défendu aux enfans de Dieu, c’est-à-dire à ceux qui observaient les loix, préceptes et commandemens de Dieu, de s’allier avec des femmes qui les avaient oubliées ou les méprisaient, de crainte de se laisser pervertir et entraîner dans le même oubli par leur exemple.

Depuis Adam jusqu’au déluge on n’a compté que deux nations : celle des Enfans de Seth établis au Nord appelés Enfans de Dieu, parce que sa loi s’y était conservée, et celle de Kaïn appelée les Enfans des Hommes relégués au midy. Les deux nations par le lieu de leur demeure figuraient les esprits pervers relégués au midy de la Création et l’esprit bon dans la partie du Nord. On ne compte que deux nations venues d’Adam parce que Abel son second fils ne laissa point de postérité matérielle. Il n’est venu que pour opérer par sa mort la réconciliation de son père Adam et être le type de la Régénération universelle. Kaïn et sa postérité fait le type des esprits pervers premiers émanés de leurs chefs ; Seth et sa postérité fait le type des mineurs ou de l’homme second émané, mais devenu l’aîné dans l’ordre spirituel. Il faut remarquer que c’est dans cette postérité de Seth et d’Énos son fils, que se sont passés tous les types spirituels survenus parmi les hommes pour leur instruction jusqu’à Noë.

Dans l’origine on voit Adam père temporel de toute sa postérité, faisant le type du Créateur, Abel faisant celui du Régénérateur, et Seth celui de l’Esprit qui instruit et dirige.

Quoique tous les hommes aient la même œuvre de molestation à remplir, il ne s’ensuit pas une nécessité absolue pour l’accomplissement des décrets du Créateur et le bien de la Création que tous la remplissent, un petit nombre ou un seul même peut luy suffire, ce qui est prouvé en plusieurs endroits de l’écriture, où pour sauver une partie considérable, il se contente de trouver dix Justes et même un.

La postérité des hommes est sauvée par Noë, trouvé seul juste aux yeux du Créateur. Noë à l’événement du déluge, âgé de 600 ans, fait le type du Créateur, flottant sur les eaux et conservant dans l’arche le germe de toutes les reproductions animales. Les dimensions de l’arche ont encore un rapport sensible avec la Création universelle, ce qui rappelle les trois essences spiritueuses dont sont provenues toutes les formes corporelles. Par ses dimensions de longueur – 300 coudées –, de largeur – 50 –, de hauteur – 30 –, on y reconnaît le nombre de la Création, et par le produit total, celui de confusion provenant de deux puissances en contradiction pour la soutenir d’une part et la délivrer de l’autre.

Par 5 le nombre qui en a occasionné la construction.

Le Temple de Salomon avait 60 coudées de long, 20 de large et 30 de haut.

L’arche avait 20 coudées de long, de large et de haut(6).

Le Temple avait 40 coudées de long(7) et 20 de large.

Devant le Temple, un vestibule de 20 coudées de long sur 20 de large.

Mêmes rapports dans les dimensions du Temple de Salomon, large de 20, long de 60, haut de 30, divisé en trois étages ou parties distinctes, le porche, le Temple, le Sanctuaire dans lequel était le Saint des Saints, lequel annonce la correspondance de l’immensité divine avec la terre figurée par le porche par le moyen du céleste et…(8).

Depuis Noë, il y a eu 3 nations, sav. Cam, Sem et Japhet. Cam l’aîné, relégué dans la partie du midy, représente le type de Kaïn et des premiers esprits émanés prévaricateurs. Sem, père de la postérité des Israëlites par Abraham, fait le type de celle de Seth. Japhet est le père de la troisième nation qui est celle des Gentils chez qui la lumière a été transportée par le mépris qu’en ont fait les Hébreux descendans de Sem en punition de leur abandon de la loi divine, et les Chrétiens d’aujourd’huy ou les Gentils provenus de Japhet sont devenus, par la pure miséricorde du Créateur, les aînés dans l’ordre de la Grâce des descendans de Sem ; mais comme ces descendans de Sem ont été le peuple choisi par le Créateur pour y manifester ses merveilles et sa gloire et que ses décrets doivent toujours s’accomplir, ils rentreront à la fin des tems dans leurs droits, et, par une réconciliation entière, ils redeviendront les aînés des Gentils, qui, par l’abus de leurs lumières, connaissances et secours, mériteront d’en être privés à leur tour, ce qui commence déjà dans le Siècle présent à se manifester.

Les Égyptiens provenus de Cam figurent avec leur Roy dans tout ce qui est raconté à leur sujet dans les Stes Écritures, les Esprits pervers démoniaques et leur chef. La terre d’Égypte figure la partie de la Création où ils sont relégués pour opérer leurs volontés mauvaises, ce qui aide à expliquer bien des passages.

Privés de toute lumière céleste, leurs yeux obscurcis par la nuée ténébreuse qui leur cache la colonne de feu qui éclaire les justes, ils suivent en aveugles la route qui est frayée devant eux, ils sont engloutis sous les eaux, et le même passage qui a mis les Israëlites en sûreté précipite leurs ennemis dans les abîmes. Les divers campemens qu’ils font dans le désert après ce passage semblent annoncer les travaux pénibles du mineur dans le cercle sensible. La loi qu’il reçoit au bas du Sinaï n’annoncerait-elle point son retour à sa puissance première dans le cercle visuel, et enfin l’entrée des Israëlites dans la Terre promise l’entrée du mineur dans le lieu de la Réintégration spirituel ou l’exercice entier de sa puissance dans le cercle rationnel(9).

(À suivre.)