CHAPITRE VII
Les usurpations de la royauté
et leurs conséquences
On dit parfois que l’histoire se répète, ce qui est faux, car il ne peut y avoir dans l’univers deux êtres ni deux événements qui soient rigoureusement semblables entre eux sous tous les rapports ; s’ils l’étaient, ils ne seraient plus deux, mais, coïncidant en tout, ils se confondraient purement et simplement, de sorte que ce ne serait qu’un seul et même être ou un seul et même événement(1). La répétition de possibilités identiques implique d’ailleurs une supposition contradictoire, celle d’une limitation de la possibilité universelle et totale, et, comme nous l’avons expliqué ailleurs avec tous les développements nécessaires(2), c’est là ce qui permet de réfuter des théories comme celles de la « réincarnation » et du « retour éternel ». Mais une autre opinion qui n’est pas moins fausse est celle qui, à l’extrême opposé de celle-là, consiste à prétendre que les faits historiques sont entièrement dissemblables, qu’il n’y a rien de commun entre eux ; la vérité est qu’il y a toujours à la fois des différences sous certains rapports et des ressemblances sous d’autres rapports, et que, comme il y a des genres d’êtres dans la nature, il y a également, dans ce domaine aussi bien que dans tous les autres, des genres de faits ; en d’autres termes, il y a des faits qui sont, dans des circonstances diverses, des manifestations ou des expressions d’une même loi. C’est pourquoi l’on rencontre parfois des situations comparables, et qui, si l’on néglige les différences pour ne retenir que les points de similitude, peuvent donner l’illusion d’une répétition ; en réalité, il n’y a jamais identité entre des périodes différentes de l’histoire, mais il y a correspondance et analogie, là comme entre les cycles cosmiques ou entre les états multiples d’un être ; et, comme différents êtres peuvent passer par des phases comparables, sous la réserve des modalités qui sont propres à la nature de chacun d’eux, il en est de même pour les peuples et pour les civilisations.
Ainsi, comme nous l’avons signalé plus haut, il y a, malgré de très grandes différences, une analogie incontestable, et qu’on n’a peut-être jamais assez remarquée, entre l’organisation sociale de l’Inde et celle du moyen âge occidental ; entre les castes de l’une et les classes de l’autre, il n’y a qu’une correspondance, non une identité, mais cette correspondance n’en est pas moins fort importante, parce qu’elle peut servir à montrer, avec une particulière netteté, que toutes les institutions présentant un caractère véritablement traditionnel reposent sur les mêmes fondements naturels et ne diffèrent en somme que par une adaptation nécessaire à des circonstances diverses de temps et de lieu. Il faut bien remarquer, d’ailleurs, que nous n’entendons nullement suggérer par là l’idée d’un emprunt que l’Europe, à cette époque, aurait fait directement à l’Inde, ce qui serait assez peu vraisemblable ; nous disons seulement qu’il y a là deux applications d’un même principe, et, au fond, cela seul importe, du moins au point de vue où nous nous plaçons présentement. Nous réservons donc la question d’une origine commune, qu’on ne pourrait assurément trouver, en tout cas, qu’en remontant fort loin dans le passé ; cette question se rattacherait à celle de la filiation des différentes formes traditionnelles à partir de la grande tradition primordiale, et c’est là, on le comprendra sans peine, quelque chose d’extrêmement complexe. Si nous signalons cependant cette possibilité, c’est parce que nous ne pensons pas que, en fait, des similitudes aussi précises puissent s’expliquer d’une façon entièrement satisfaisante en dehors d’une transmission régulière et effective, et aussi parce que nous rencontrons au moyen âge beaucoup d’autres indices concordants, qui montrent assez clairement qu’il y avait encore en Occident un lien conscient, au moins pour quelques-uns, avec le véritable « centre du monde », source unique de toutes les traditions orthodoxes, alors que, par contre, nous ne voyons plus rien de tel à l’époque moderne.
En Europe, nous trouvons aussi, dès le moyen âge, l’analogue de la révolte des Kshatriyas ; nous le trouvons même plus particulièrement en France, où, à partir de Philippe le Bel, qui doit être considéré comme un des principaux auteurs de la déviation caractéristique de l’époque moderne, la royauté travailla presque constamment à se rendre indépendante de l’autorité spirituelle, tout en conservant cependant, par un singulier illogisme, la marque extérieure de sa dépendance originelle, puisque, comme nous l’avons expliqué, le sacre des rois n’était pas autre chose. Les « légistes » de Philippe le Bel sont déjà, bien avant les « humanistes » de la Renaissance, les véritables précurseurs du « laïcisme » actuel ; et c’est à cette époque, c’est-à-dire au début du xive siècle, qu’il faut faire remonter en réalité la rupture du monde occidental avec sa propre tradition. Pour des raisons qu’il serait trop long d’exposer ici, et que nous avons d’ailleurs indiquées dans d’autres études(3), nous pensons que le point de départ de cette rupture fut marqué très nettement par la destruction de l’Ordre du Temple ; nous rappellerons seulement que celui-ci constituait comme un lien entre l’Orient et l’Occident, et que, en Occident même, il était, par son double caractère religieux et guerrier, une sorte de trait d’union entre le spirituel et le temporel, si même ce double caractère ne doit être interprété comme le signe d’une relation plus directe avec la source commune des deux pouvoirs(4). On sera peut-être tenté d’objecter que cette destruction, si elle fut voulue par le roi de France, fut du moins réalisée d’accord avec la Papauté ; la vérité est qu’elle fut imposée à la Papauté, ce qui est tout différent ; et c’est ainsi que, renversant les rapports normaux, le pouvoir temporel commença dès lors à se servir de l’autorité spirituelle pour ses fins de domination politique. On dira sans doute encore que le fait que cette autorité spirituelle se laissa ainsi subjuguer prouve qu’elle n’était déjà plus ce qu’elle aurait dû être, et que ses représentants n’avaient plus la pleine conscience de son caractère transcendant ; cela est vrai, et c’est d’ailleurs ce qui explique et justifie, à cette époque même, les invectives parfois violentes de Dante à leur égard ; mais il n’en reste pas moins que, vis-à-vis du pouvoir temporel, c’était malgré tout l’autorité spirituelle, et que c’est d’elle qu’il tenait sa légitimité. Les représentants du pouvoir temporel ne sont pas, comme tels, qualifiés pour reconnaître si l’autorité spirituelle correspondant à la forme traditionnelle dont ils relèvent possède ou non la plénitude de sa réalité effective ; ils en sont même incapables par définition, puisque leur compétence est limitée à un domaine inférieur ; quelle que soit cette autorité, s’ils méconnaissent leur subordination à son égard, ils compromettent par là même leur légitimité. Il faut donc avoir bien soin de distinguer la question de ce que peut être une autorité spirituelle en elle-même, à tel ou tel moment de son existence, et celle de ses rapports avec le pouvoir temporel ; la seconde est indépendante de la première, qui ne regarde que ceux qui exercent des fonctions d’ordre sacerdotal ou qui seraient normalement qualifiés pour les exercer ; et, même si cette autorité, par la faute de ses représentants, avait entièrement perdu l’« esprit » de sa doctrine, la seule conservation du dépôt de la « lettre » et des formes extérieures dans lesquelles cette doctrine est contenue en quelque façon continuerait encore à lui assurer la puissance nécessaire et suffisante pour exercer valablement sa suprématie sur le temporel(5), car cette suprématie est attachée à l’essence même de l’autorité spirituelle et lui appartient tant qu’elle subsiste régulièrement, si diminuée qu’elle puisse être en elle-même, la moindre parcelle de spiritualité étant encore incomparablement supérieure à tout ce qui relève de l’ordre temporel. Il résulte de là que, tandis que l’autorité spirituelle peut et doit toujours contrôler le pouvoir temporel, elle-même ne peut être contrôlée par rien d’autre, du moins extérieurement(6) ; si choquante qu’une telle affirmation puisse paraître aux yeux de la plupart de nos contemporains, nous n’hésitons pas à déclarer que ce n’est là que l’expression d’une vérité indéniable(7).
Mais revenons à Philippe le Bel, qui nous fournit un exemple particulièrement typique pour ce que nous nous proposons d’expliquer ici : il est à remarquer que Dante attribue comme mobile à ses actions la « cupidité »(8), qui est un vice, non de Kshatriya, mais de Vaishya ; on pourrait dire que les Kshatriyas, dès qu’ils se mettent en état de révolte, se dégradent en quelque sorte et perdent leur caractère propre pour prendre celui d’une caste inférieure. On pourrait même ajouter que cette dégradation doit inévitablement accompagner la perte de la légitimité : si les Kshatriyas sont, par leur faute, déchus de leur droit normal à l’exercice du pouvoir temporel, c’est qu’ils ne sont pas de vrais Kshatriyas, nous voulons dire que leur nature n’est plus telle qu’elle les rende aptes à remplir ce qui était leur fonction propre. Si le roi ne se contente plus d’être le premier des Kshatriyas, c’est-à-dire le chef de la noblesse, et de jouer le rôle « régulateur » qui lui appartient à ce titre, il perd ce qui fait sa raison d’être essentielle, et, en même temps, il se met en opposition avec cette noblesse dont il n’était que l’émanation et comme l’expression la plus achevée. C’est ainsi que nous voyons la royauté, pour « centraliser » et absorber en elle les pouvoirs qui appartiennent collectivement à la noblesse tout entière, entrer en lutte avec celle-ci et travailler avec acharnement à la destruction de la féodalité, dont pourtant elle était issue ; elle ne pouvait d’ailleurs le faire qu’en s’appuyant sur le tiers-état, qui correspond aux Vaishyas ; et c’est pourquoi nous voyons aussi, à partir de Philippe le Bel précisément, les rois de France s’entourer presque constamment de bourgeois, surtout ceux qui, comme Louis XI et Louis XIV, ont poussé le plus loin le travail de « centralisation », dont la bourgeoisie devait du reste recueillir ensuite le bénéfice lorsqu’elle s’empara du pouvoir par la Révolution.
La « centralisation » temporelle est d’ailleurs généralement la marque d’une opposition vis-à-vis de l’autorité spirituelle, dont les gouvernements s’efforcent de neutraliser ainsi l’influence pour y substituer la leur ; c’est pourquoi la forme féodale, qui est celle où les Kshatriyas peuvent exercer le plus complètement leurs fonctions normales, est en même temps celle qui paraît convenir le mieux à l’organisation régulière des civilisations traditionnelles, comme l’était celle du moyen âge. L’époque moderne, qui est celle de la rupture avec la tradition, pourrait, sous le rapport politique, être caractérisée par la substitution du système national au système féodal ; et c’est au xive siècle que les « nationalités » commencèrent à se constituer, par ce travail de « centralisation » dont nous venons de parler. On a raison de dire que la formation de la « nation française », en particulier, fut l’œuvre des rois ; mais ceux-ci, par là même, préparaient sans le savoir leur propre ruine(9) ; et, si la France fut le premier pays d’Europe où la royauté fut abolie, c’est parce que c’est en France que la « nationalisation » avait eu son point de départ. D’ailleurs, il est à peine besoin de rappeler combien la Révolution fut farouchement « nationaliste » et « centralisatrice », et aussi quel usage proprement révolutionnaire fut fait, durant tout le cours du xixe siècle, du soi-disant « principe des nationalités »(10) ; il y a donc une assez singulière contradiction dans le « nationalisme » qu’affichent aujourd’hui certains adversaires déclarés de la Révolution et de son œuvre. Mais le point le plus intéressant pour nous présentement est celui-ci : la formation des « nationalités » est essentiellement un des épisodes de la lutte du temporel contre le spirituel ; et, si l’on veut aller au fond des choses, on peut dire que c’est précisément pour cela qu’elle fut fatale à la royauté, qui, alors même qu’elle semblait réaliser toutes ses ambitions, ne faisait que courir à sa perte(11).
Il est une sorte d’unification politique, donc tout extérieure, qui implique la méconnaissance, sinon la négation, des principes spirituels qui seuls peuvent faire l’unité véritable et profonde d’une civilisation, et les « nationalités » en sont un exemple. Au moyen âge, il y avait, pour tout l’Occident, une unité réelle, fondée sur des bases d’ordre proprement traditionnel, qui était celle de la « Chrétienté » ; lorsque furent formées ces unités secondaires, d’ordre purement politique, c’est-à-dire temporel et non plus spirituel, que sont les nations, cette grande unité de l’Occident fut irrémédiablement brisée, et l’existence effective de la « Chrétienté » prit fin. Les nations, qui ne sont que les fragments dispersés de l’ancienne « Chrétienté », les fausses unités substituées à l’unité véritable par la volonté de domination du pouvoir temporel, ne pouvaient vivre, par les conditions mêmes de leur constitution, qu’en s’opposant les unes aux autres, en luttant sans cesse entre elles sur tous les terrains(12) ; l’esprit est unité, la matière est multiplicité et division, et plus on s’éloigne de la spiritualité, plus les antagonismes s’accentuent et s’amplifient. Personne ne pourra contester que les guerres féodales, étroitement localisées, et d’ailleurs soumises à une règlementation restrictive émanant de l’autorité spirituelle, n’étaient rien en comparaison des guerres nationales, qui ont abouti, avec la Révolution et l’Empire, aux « nations armées »(13), et que nous avons vues prendre de nos jours de nouveaux développements fort peu rassurants pour l’avenir.
D’autre part, la constitution des « nationalités » rendit possibles de véritables tentatives d’asservissement du spirituel au temporel, impliquant un renversement complet des rapports hiérarchiques entre les deux pouvoirs ; cet asservissement trouve son expression la plus définie dans l’idée d’une Église « nationale », c’est-à-dire subordonnée à l’État et enfermée dans les limites de celui-ci ; et le terme même de « religion d’État », sous son apparence volontairement équivoque, ne signifie rien d’autre au fond : c’est la religion dont le gouvernement temporel se sert comme d’un moyen pour assurer sa domination ; c’est la religion réduite à n’être plus qu’un simple facteur de l’ordre social(14). Cette idée d’Église « nationale » vit le jour tout d’abord dans les pays protestants, ou, pour mieux dire, c’est peut-être surtout pour la réaliser que le Protestantisme fut suscité, car il semble bien que Luther n’ait guère été, politiquement tout au moins, qu’un instrument des ambitions de certains princes allemands, et il est fort probable que, sans cela, même si sa révolte contre Rome s’était produite, les conséquences en auraient été tout aussi négligeables que celles de beaucoup d’autres dissidences individuelles qui ne furent que des incidents sans lendemain. La Réforme est le symptôme le plus apparent de la rupture de l’unité spirituelle de la « Chrétienté », mais ce n’est pas elle qui commença, suivant l’expression de Joseph de Maistre, à « déchirer la robe sans couture » ; cette rupture était alors un fait accompli depuis longtemps déjà, puisque, comme nous l’avons dit, son début remonte en réalité deux siècles plus tôt ; et l’on pourrait faire une remarque analogue au sujet de la Renaissance, qui, par une coïncidence où il n’y a rien de fortuit, se produisit à peu près en même temps que la Réforme, et seulement alors que les connaissances traditionnelles du moyen âge étaient presque entièrement perdues. Le Protestantisme fut donc plutôt, à cet égard, un aboutissement qu’un point de départ ; mais, s’il fut surtout, en réalité, l’œuvre des princes et des souverains, qui l’utilisèrent tout d’abord à des fins politiques, ses tendances individualistes ne devaient pas tarder à se retourner contre ceux-ci, car elles préparaient directement la voie aux conceptions démocratiques et égalitaires de l’époque actuelle(15).
Pour revenir à ce qui concerne l’asservissement de la religion à l’État, sous la forme que nous venons d’indiquer, ce serait d’ailleurs une erreur de croire qu’on n’en trouverait pas d’exemples en dehors du Protestantisme(16) : si le schisme anglican d’Henri VIII est la réussite la plus complète dans la constitution d’une Église « nationale », le gallicanisme lui-même, tel que Louis XIV a pu le concevoir, n’était pas autre chose au fond ; si cette tentative avait abouti, le rattachement à Rome aurait sans doute subsisté en théorie, mais, pratiquement, les effets en auraient été complètement annulés par l’interposition du pouvoir politique, et la situation n’aurait pas été sensiblement différente en France de ce qu’elle pourrait être en Angleterre si les tendances de la fraction « ritualiste » de l’Église anglicane arrivaient à prévaloir définitivement(17). Le Protestantisme, sous ses différentes formes, a poussé les choses à l’extrême ; mais ce n’est pas seulement dans les pays où il s’établit que la royauté détruisit son propre « droit divin », c’est-à-dire l’unique fondement réel de sa légitimité, et, en même temps, l’unique garantie de sa stabilité ; d’après ce qui vient d’être exposé, la royauté française, sans aller jusqu’à une rupture aussi manifeste avec l’autorité spirituelle, avait en somme, par d’autres moyens plus détournés, agi exactement de la même façon, et même il semble bien qu’elle avait été la première à s’engager dans cette voie ; ceux de ses partisans qui lui en font une sorte de gloire ne paraissent guère se rendre compte des conséquences que cette attitude a entraînées et qu’elle ne pouvait pas ne pas entraîner. La vérité est que c’est la royauté qui, par là, ouvrit inconsciemment le chemin à la Révolution, et que celle-ci, en la détruisant, ne fit qu’aller plus loin dans le sens du désordre où elle-même avait commencé à s’engager. En fait, partout dans le monde occidental, la bourgeoisie est parvenue à s’emparer du pouvoir, auquel la royauté l’avait tout d’abord fait participer indûment ; peu importe d’ailleurs qu’elle ait alors aboli la royauté comme en France, ou qu’elle l’ait laissée subsister nominalement comme en Angleterre ou ailleurs ; le résultat est le même dans tous les cas, et c’est le triomphe de l’« économique », sa suprématie proclamée ouvertement. Mais, à mesure qu’on s’enfonce dans la matérialité, l’instabilité s’accroît, les changements se produisent de plus en plus rapidement ; aussi le règne de la bourgeoisie ne pourra-t-il avoir qu’une assez courte durée, en comparaison de celle du régime auquel il a succédé ; et, comme l’usurpation appelle l’usurpation, après les Vaishyas, ce sont maintenant les Shûdras qui, à leur tour, aspirent à la domination : c’est là, très exactement, la signification du bolchevisme. Nous ne voulons, à cet égard, formuler aucune prévision, mais il ne serait sans doute pas bien difficile de tirer, de ce qui précède, certaines conséquences pour l’avenir : si les éléments sociaux les plus inférieurs accèdent au pouvoir d’une façon ou d’une autre, leur règne sera vraisemblablement le plus bref de tous, et il marquera la dernière phase d’un certain cycle historique, puisqu’il n’est pas possible de descendre plus bas ; si même un tel événement n’a pas une portée plus générale, il est donc à supposer qu’il sera tout au moins, pour l’Occident, la fin de la période moderne.
Un historien qui s’appuierait sur les données que nous avons indiquées pourrait sans doute développer ces considérations presque indéfiniment, en recherchant des faits plus particuliers qui feraient encore ressortir, d’une façon très précise, ce que nous avons voulu montrer principalement ici(18) : cette responsabilité trop peu connue du pouvoir royal à l’origine de tout le désordre moderne, cette première déviation, dans les rapports du spirituel et du temporel, qui devait inévitablement entraîner toutes les autres. Quant à nous, ce ne peut être là notre rôle ; nous avons voulu donner seulement des exemples destinés à éclairer un exposé synthétique ; nous devons donc nous en tenir aux grandes lignes de l’histoire, et nous borner aux indications essentielles qui se dégagent de la suite même des événements.