Janvier-février 1948

Société des Journaux et Publications du Centre, Limoges.

Ce qu’il y a peut-être de plus remarquable dans ce petit volume, c’est le fait qu’il a été écrit par un prêtre et publié avec l’« imprimatur » de l’autorité ecclésiastique ; c’est là en effet quelque chose d’assez exceptionnel à notre époque, où les représentants officiels du Catholicisme, en général, ont plutôt tendance à ignorer le symbolisme ou à s’abstenir d’en parler, surtout lorsque, comme c’est le cas ici, il touche de près à des questions d’ordre proprement ésotérique. Dans une introduction sur l’« interprétation du symbolisme des choses », l’auteur défend celui-ci contre le reproche que lui font certains d’être « conventionnel et arbitraire », mais insuffisamment à notre avis, car il ne semble pas voir bien nettement le principe essentiel du véritable symbolisme traditionnel et son caractère « non-humain ». Il étudie ensuite le symbolisme de la rose (Rosa Mystica), puis celui du chapelet et du rosaire, avec d’assez abondantes considérations sur les nombres ; ensuite vient une longue explication détaillée de l’image (d’origine byzantine) de Notre-Dame du Perpétuel Secours, dans laquelle le symbolisme des couleurs joue le principal rôle. Il n’y a assurément rien de bien nouveau dans tout cela, mais du moins ces notions pourront-elles atteindre ainsi un public qui, très probablement, n’irait jamais les chercher là où l’auteur lui-même les a puisées. Il est seulement regrettable qu’il ait cru devoir rééditer incidemment quelques grossières calomnies antimaçonniques ; s’y est-il cru en quelque sorte obligé pour faire accepter le reste plus aisément ? Il commet aussi l’erreur de prendre les Rose-Croix pour une « association initiatique maçonnique très secrète », qu’il accuse par surcroît de « luciférianisme » en s’appuyant sur un passage du Lucifer démasqué, de Jean Kostka, sans d’ailleurs s’apercevoir que celui-ci vise en réalité le grade maçonnique de Rose-Croix (18e du Rite Écossais), qui, malgré son titre, est quelque chose de tout à fait différent. D’autre part, on peut se demander pourquoi il a reproduit, sans du reste en indiquer la provenance ni en donner la moindre explication, l’emblème de la Rosicrucian Fellowship de Max Heindel, qui n’a certes rien de commun avec le Rosicrucianisme authentique.

Éditions Spelt, Paris.

Les auteurs se sont proposé d’examiner, assez rapidement d’ailleurs, les nombreuses énigmes que présente la vie de Jeanne d’Arc, en les classant en deux catégories, celle des « énigmes historiques » et celle des « énigmes psychiques », Pour résoudre les premières, ils inclinent à admettre la thèse d’après laquelle Jeanne d’Arc aurait été issue de sang royal ; ils utilisent surtout à cet égard les récents ouvrages de M. Jean Jacoby, mais ils ne semblent pas avoir connaissance de certains travaux antérieurs concluant dans le même sens ; il est assez étonnant, en particulier, qu’ils ne mentionnent même pas le livre de Francis André (Mme Bessonnet-Favre), La Pucelle et les Sociétés secrètes de son temps, qui, malgré toutes les réserves qu’il appelle à certains points de vue, est sans doute un des plus curieux qui aient été écrits sur ce sujet, Quant aux « énigmes psychiques », ils veulent les expliquer par la « métapsychique moderne » ; nous ne savons s’ils sont spirites, mais, en tout cas, leur façon de voir revient à faire de Jeanne d’Arc un simple « médium » ; ils cherchent d’ailleurs à appliquer aussi la même interprétation aux faits « supranormaux » qui se rencontrent dans la vie d’autres personnages assez divers : Socrate, saint François d’Assise, sainte Catherine de Sienne, Râmakrishna ; en somme, c’est là encore un nouvel exemple de la fâcheuse confusion du psychique et du spirituel, qui est malheureusement si fréquente chez nos contemporains.

Paul Derain, Lyon.

Cette brochure, qui porte comme sous-titre « essai de philosophie scientifique », est basée sur l’idée qu’« une interprétation logique des lois qui règlent le fonctionnement de l’énergie dans le monde peut nous fournir une explication claire du phénomène de la mort ». L’auteur y expose des considérations inspirées surtout de la physique et de la biologie modernes, pour aboutir à la conception d’une « évolution » s’effectuant par « l’alternance des périodes de vie et des périodes de mort ». Il s’agit donc en somme d’une conception « réincarnationniste », et, bien qu’il dise que « ce terme de réincarnation doit être entendu dans un sens plus large que son sens étymologique », nous ne voyons pas quelle différence cela fait que les « vies successives » aient lieu sur la terre seulement ou dans d’autres astres, puisque tout cela appartient au même monde corporel ; l’impossibilité métaphysique est la même dans tous les cas. Du reste, l’idée de l’« alternance » implique au fond la réduction de la réalité tout entière à deux mondes, celui-ci et l’« au-delà » ; que nous sommes loin, avec des théories de ce genre, de la vraie notion de la multiplicité indéfinie des états de l’être, et qu’il est donc difficile aux Occidentaux de sortir des cadres étroits auxquels leur éducation les a habitués !