Juin 1950

Pellerano Del Gandio, Napoli.

Le contenu de cet ouvrage est la reproduction d’un cours professé à l’Université de Naples, mais qui, par l’esprit dans lequel il est conçu, diffère grandement et fort heureusement de ce que sont d’ordinaire les cours universitaires en général et les cours d’économie politique en particulier. On peut d’ailleurs s’en apercevoir dès la première page, car le livre porte en épigraphe cette citation de notre collaborateur F. Schuon : « Il n’y a donc, en définitive, que deux possibilités : civilisation intégrale, spirituelle, impliquant abus et superstitions, et civilisation fragmentaire, matérialiste, progressiste, impliquant certains avantages terrestres, mais excluant ce qui constitue la raison suffisante et la fin dernière de toute civilisation. L’histoire est là pour prouver qu’il n’y a pas d’autre choix. Le reste est rhétorique et chimère. » L’auteur s’est proposé tout d’abord de donner ou plutôt de restituer à l’« économie » un sens légitime, en montrant que les mots grecs dont ce terme est composé avaient à l’origine, outre la signification en quelque sorte matérielle qui est la seule qu’on leur attribue aujourd’hui, une tout autre signification, d’ordre proprement spirituel, se référant aux principes mêmes dont cette science devrait normalement être une application dans le domaine social ; cela est d’ailleurs vrai aussi du mot « politique » lui-même, en raison de ce qu’était la conception ancienne et traditionnelle de la « cité » (et ceci nous rappelle les considérations du même ordre exposées par A. K. Coomaraswamy dans What is Civilization ?)(*). Il expose ce que doit être une véritable économie traditionnelle, en prenant pour exemple l’organisation corporative du moyen âge ; et, à ce propos, il insiste particulièrement sur deux caractéristiques qui doivent nécessairement se retrouver dans toute société de type traditionnel : « le sens religieux de la vie et de l’être, et le sens de la hiérarchie basé exclusivement sur des valeurs d’ordre spirituel ». Il explique ensuite dans quelles circonstances les conceptions économiques médiévales furent abandonnées, et par quelles phases successives passèrent, depuis la Renaissance jusqu’à nos jours, celles qui leur furent substituées : « mercantilisme » d’abord, « capitalisme » ensuite, avec une prédominance de plus en plus exclusive du point de vue « matérialiste » et « quantitatif » ; l’économie dite « bourgeoise » fournit, comme l’auteur ne manque pas de le signaler, d’abondantes illustrations de ce que nous avons exposé dans Le Règne de la Quantité. Il y a dans tout cela de nombreuses considérations du plus grand intérêt, qu’il nous est malheureusement impossible d’examiner ici en détail : ce sont d’ailleurs surtout les premiers chapitres qui sont les plus importants à notre point de vue, car la suite est forcément d’un caractère beaucoup plus technique et nous ne sommes pas compétent pour l’apprécier, mais nous pouvons du moins nous rendre compte que, à travers tous ces développements, les principes directeurs posés au début ne sont jamais perdus de vue. Nous félicitons vivement le professeur Palomba du courage dont il fait preuve en réagissant ainsi, en plein milieu universitaire, contre les idées modernes et officiellement admises, et nous ne pouvons que conseiller la lecture de son livre à tous ceux qui s’intéressent à ces questions et qui connaissent la langue italienne car ils en tireront le plus grand profit.