Novembre-décembre 1923
- Augustin Périer. — Yahyâ ben Adî : un
philosophe arabe chrétien du xe siècle. — Petits traités
apologétiques de Yahyâ ben Adî.
Deux vol. in-8o de 228 et 136 pp., J. Gabalda et P. Geuthner, Paris, 1920.
Le plus grand reproche que nous adresserons au travail de M. l’abbé Périer, c’est qu’il a vraiment un peu trop l’aspect extérieur d’une « thèse », au sens universitaire de ce mot ; c’en est une, en effet, mais est-il bien nécessaire que la présentation s’en ressente à ce point ? Cela ne peut que nuire à un ouvrage qui, par l’incontestable intérêt des renseignements qu’il apporte sur un sujet fort peu connu, mériterait pourtant de ne point passer inaperçu.
L’œuvre de Yahyâ ben Adî, du moins dans ce qui en est parvenu jusqu’à nous (car ses nombreux traités proprement philosophiques sont malheureusement perdus), apparaît surtout comme une utilisation de la doctrine aristotélicienne à des fins apologétiques. Ce qu’il y a de curieux, d’ailleurs, c’est que, à cette époque, toutes les écoles musulmanes et toutes les sectes chrétiennes (jacobites, melchites, nestoriens et autres) prétendaient s’appuyer également sur Aristote, où chacune croyait trouver une confirmation de ses théories particulières. M. Périer pense que « c’est sur le prolongement de l’École d’Alexandrie qu’il faut chercher le point de jonction entre l’aristotélisme et la philosophie arabe » ; c’est là une question qu’il pourrait être intéressant d’examiner de plus près.
Après une vue d’ensemble sur les idées philosophiques de Yahyâ ben Adî telles qu’elles se dégagent de fragments assez peu cohérents dans leur état actuel, M. Périer donne une analyse très développée, avec de larges extraits, de ses grands traités théologiques : le Traité de l’Unité, le Traité de la Trinité et le Traité de l’Incarnation ou de l’Union. Cette partie, que nous ne pouvons songer à résumer ici, est de beaucoup la plus importante ; les procédés dialectiques mis en œuvre par le philosophe arabe pour répondre aux objections de ses contradicteurs sont tout à fait dignes d’attention et souvent fort originaux.
Nous nous permettons une critique de détail : M. Périer n’a pas compris ce que les Arabes, tant musulmans que chrétiens, entendent par « l’homme universel » (qui n’est pas du tout « l’espèce humaine », et qui n’est pas davantage une « abstraction ») ; et il trouve « puérile », précisément faute de la comprendre, une conception d’une très haute portée métaphysique. Et pourquoi juge-t-il bon, à ce propos, de professer un certain dédain pour les « subtilités scolastiques », et de laisser transparaître un « nominalisme » qui n’avait rien à voir avec le rôle d’historien auquel il entendait se borner ?
Le second volume comprend le texte et la traduction de huit petits traités apologétiques de Yahyâ ben Adî, plus la traduction seule d’un neuvième traité. Nous ne pouvons que rendre hommage au labeur fort pénible qu’a dû s’imposer M. Périer pour éditer un texte, pour la première fois, avec des manuscrits très défectueux. Quant à sa traduction française, il dit « qu’il s’est efforcé de la rendre fidèle et claire », et il nous paraît y avoir fort bien réussi.
- Baron Carra de Vaux. — Les Penseurs de
l’Islam. — I. Les souverains, l’histoire et la philosophie politique. — II. Les
géographes, les sciences mathématiques et naturelles.
Deux vol. in-16o de 384 et 400 pp., P. Geuthner, Paris, 1921.
Ces volumes sont les deux premiers d’une série qui doit en comporter cinq et qui a pour but de donner un aperçu d’ensemble sur l’intellectualité musulmane dans toutes les branches où s’est exercée son activité. « Nous avons voulu, dit l’auteur, faire ici, non un catalogue, mais un choix. Notre intention n’a pas été de tout dire, mais de mettre en relief les figures principales, de faire connaître les œuvres maîtresses, de donner le sentiment de quelques idées essentielles, la vue de certains sommets ». Le besoin se faisait grandement sentir, en effet, d’un tel ouvrage, donnant les indications nécessaires pour se reconnaître parmi la multitude des travaux de détail auxquels se complaisent d’ordinaire les orientalistes.
Le titre général peut prêter à une critique, car il ne semble pas parfaitement exact ; du moins le mot de « penseurs » y est pris dans une acception très large. On peut s’en rendre compte par les sous-titres : les personnages dont il est question jusqu’ici, sauf un petit nombre d’exceptions, ne sont pas des penseurs au sens où on l’entend habituellement ; sans doute l’emploi de ce mot sera-t-il plus justifié pour les volumes qui doivent suivre. Quoi qu’il en soit, il y a là des exposés fort intéressants, notamment dans le second volume, plus particulièrement important en ce qui concerne l’histoire des sciences ; on ne sait pas assez, en Europe, tout ce qu’on doit aux Arabes, par qui se sont conservées et transmises en grande partie les connaissances de l’antiquité, sans compter tout ce qu’eux-mêmes y ont ajouté, notamment dans l’ordre mathématique. C’est ce qui ressort très nettement de cet ouvrage, dont l’auteur fait preuve, à cet égard, de beaucoup d’impartialité ; malheureusement, il n’en est pas de même lorsque vient à se poser la question des origines : il veut que la science arabe se soit inspirée à peu près exclusivement de la science grecque, ce qui est vraiment excessif. Que les derniers néo-platoniciens se soient réfugiés en Perse, et que de là ils aient exercé une certaine influence sur le monde musulman, cela est fort admissible ; mais enfin il y a eu autre chose, et, en Perse même, le Mazdéisme n’était pas un élément négligeable (notons d’ailleurs, à ce propos, ce fait trop généralement ignoré, que les musulmans honorent Zoroastre comme un prophète). En astronomie, les Perses devaient sans doute beaucoup plus aux Chaldéens qu’aux Grecs ; et, d’un autre côté, il ne nous paraît pas que la secte arabe des Sabéens, qui fournit beaucoup de savants dans les quatre premiers siècles de l’Islam, puisse être regardée comme se rattachant proprement au néo-platonisme. D’ailleurs, celui-ci, au fond, n’était-il pas plus oriental que grec sous bien des rapports, et n’est-ce pas pour cela, précisément, que les Orientaux accueillirent volontiers parmi eux ses représentants ? Mais c’est surtout quand il s’agit de l’Inde que le parti pris devient par trop manifeste : quand les Arabes eux-mêmes appliquent à quelque chose l’épithète de hindi, « cela ne tire pas à conséquence », et il suffit que l’influence indienne « ne soit pas évidente » pour qu’on l’écarte résolument, tandis que, par contre, on fait valoir en faveur de l’influence grecque les coïncidences les plus insignifiantes. Il y aurait beaucoup à dire sur certains points, comme l’origine des chiffres, celle de l’algèbre, la question des périodes astronomiques, et aussi, pour la Chine, l’invention de la boussole ; mais nous ne pouvons y insister davantage. Ajoutons seulement une dernière remarque : il est pour le moins singulier de présenter l’empereur mogol Akbar comme « un des pères du théosophisme moderne » ; si peu orthodoxe qu’ait pu être le syncrétisme religieux de ce souverain, il ne méritait vraiment pas cette injure, car c’en est bien une, encore que l’auteur ne semble pas du tout la considérer comme telle. Mais ces diverses réserves, qui ne portent pas en somme sur ce qu’il y a de plus essentiel, ne doivent pas nous faire méconnaître la réelle valeur d’un ouvrage fort consciencieusement fait et qui peut rendre de très grands services.
- Lothrop Stoddard. — Le Nouveau Monde de
l’Islam.
Traduit de l’anglais par Abel Doysié (un vol. in-8o de 323 pp., Payot, Paris, 1923).
Bien que cet ouvrage traite surtout des questions d’ordre politique et social, il est intéressant aussi à d’autres points de vue. L’auteur, disons-le tout de suite, est loin d’être impartial : il est imbu de tous les préjugés occidentaux en général, et de ceux du protestantisme anglo-saxon en particulier ; il réédite tous les clichés courants sur l’« obscurantisme » et sur le « progrès » ; il ne trouve à louer que ce qui lui paraît, à tort ou à raison, avoir une teinte de « puritanisme » ou de « rationalisme » ; et il a une tendance, assez naturelle dans ces conditions, à exagérer l’importance du rôle des « réformateurs libéraux » et surtout celle de l’influence occidentale. Il prend pour une « élite » ces rares éléments européanisés qui, au point de vue oriental, sont plutôt tout le contraire, et, trop souvent, des apparences tout extérieures l’empêchent de voir la réalité profonde, qu’il est d’ailleurs très probablement incapable de saisir. En effet, on pourra se faire une idée suffisante de son manque absolu d’intellectualité (défaut bien américain) pas ces deux exemples : les doctrines purement métaphysiques de certaines écoles arabes ne sont pour lui que « superstition et mysticisme puéril », et l’enseignement traditionnel, basé sur l’étude des textes sacrés, est « une ineptie qui pétrifie l’intelligence » !
Cependant, ce livre mérite d’être lu, parce qu’il est généralement bien informé ; aussi ne peut-on que regretter que l’auteur, au lieu de s’en tenir à l’exposé des faits, y mêle constamment des appréciations tendancieuses, aggravées par une multitude d’épithètes injurieuses, ou tout au moins blessantes pour les Orientaux. Il y a là, sur la politique anglaise en Orient au cours de ces dernières années, un certain nombre de vérités qu’il serait extrêmement utile de répandre. La partie la plus intéressante de l’ouvrage est peut-être celle qui est consacrée au « nationalisme » ; on y voit assez bien la différence des idées que ce même mot sert à désigner, suivant qu’il s’agit de l’Occident ou de l’Orient ; sur les rapports de la « nationalité » et de la « race », il y a aussi des considérations dignes d’être remarquées, bien qu’elles manquent un peu de précision.
Disons encore que le titre ne donne pas une idée exacte de l’ouvrage dans son ensemble, car il y est question, non seulement de la situation actuelle du monde musulman, mais aussi de celle de l’Inde ; cette étude embrasse donc à la fois ce que l’on peut appeler le Proche et le Moyen Orient. L’auteur est très prudent dans ses conclusions, ce dont on ne peut que l’approuver ; il s’abstient soigneusement de formuler la moindre prévision sur le cours ultérieur des événements. Enfin, malgré sa partialité évidente, il ne peut s’empêcher de reconnaître que, si certains dangers menacent l’Occident, celui-ci y a une large part de responsabilité.
La traduction est littérale au point d’en être parfois incorrecte, et elle est déparée par des bizarreries de langage qu’il eût été bien facile d’éviter. Ainsi, en français, on ne dit pas « bribe », mais « corruption » ou « vénalité » ; on ne dit pas un « papier », mais un « article » sur tel ou tel sujet ; « practically » ne se traduit pas toujours par « pratiquement », et ainsi de suite. Il y a aussi une confusion entre « indien » et « hindou », dont nous ne savons si elle est imputable à l’auteur ou au traducteur. Et, puisque nous en sommes à la forme, il est un peu ridicule en France, sinon en Amérique, de donner à la dernière guerre la dénomination apocalyptique d’« Armageddon ».
- Louis Finot. — La marche à la Lumière
(Bodhicharyâvatâra).
Poème sanscrit de Çântideva ; traduction française avec introduction (un vol. in-8o de 168 pp. Collection des Classiques de l’Orient ; Bossard, Paris, 1920).
La Bodhi, terme qui a été traduit un peu librement par « Lumière », et qui évoque plutôt l’idée de « Sagesse », est « l’Illumination suprême qui révèle au Buddha la loi de l’univers » ; la marche à la Bodhi, c’est donc « l’ensemble des exercices spirituels qui acheminent vers son but le futur Buddha ». Le traité de Çântideva, indépendamment de ses mérites poétiques, est très propre à donner une idée de l’ascèse bouddhique du Mahâyâna ou « Grand Véhicule », qui propose pour but à ses adhérents « l’état idéal de Buddha sauveur du monde », tandis que le Hinayâna ou « Petit Véhicule » se contente de conduire les siens à la paix du Nirvâna. Il offre aussi, surtout dans ses derniers chapitres, un excellent spécimen de la dialectique spéciale de l’école des Mâdhyamikas, à laquelle appartenait son auteur, qui vivait, croit-on, vers le viie siècle de l’ère chrétienne.
Il existait déjà une traduction française du Bodhicharyâvatâra, due à M. de la Vallée-Poussin, et publiée en 1905-1907 dans la Revue d’Histoire et de Littérature religieuses. « Cette traduction, dit M. Finot dans son introduction, met au premier plan l’explication doctrinale et y sacrifie délibérément la concision, qui est le principal mérite du style de Çântideva. » C’est à un autre point de vue, plutôt littéraire, que lui-même a voulu se placer ; mais on pourrait se demander si, en s’efforçant de conserver la concision de l’original, il n’a pas introduit dans sa version un peu d’obscurité ; et il est fâcheux qu’il n’ait pas jugé bon tout au moins d’y joindre un plus grand nombre de notes explicatives, pour suppléer à l’insuffisance des mots français qui, bien souvent, ne correspondent que très approximativement aux termes sanscrits. Ce n’est pas en calquant scrupuleusement la traduction sur le texte que l’on peut rendre le mieux l’esprit de celui-ci, surtout quand il s’agit d’un texte oriental ; et n’est-il pas à craindre que, dans ces conditions, l’essentiel de la pensée n’échappe à la plupart des lecteurs ? Enfin, même quand on entend s’adresser simplement au « public lettré », et quelque dédain qu’on lui suppose à l’égard des « questions théologiques », est-il bien légitime d’accorder plus d’importance à la forme qu’au fond ?
- Émile Senart. — La Bhagavad-Gîtâ.
Traduite du sanscrit avec une introduction (un vol. in-8o de 174 pp. Collection des Classiques de l’Orient ; Bossard, Paris, 1922).
De tous les textes hindous, la Bhagavad-Gîtâ est très certainement un des plus connus en Europe, un de ceux qui ont été le plus fréquemment traduits et commentés en diverses langues. On sait que ce dialogue entre Krishna et son disciple Arjuna est un fragment du Mahâbhârata, l’une des deux grandes épopées de l’Inde antique. Certains ont voulu y voir l’expression de ce qu’il y a de plus élevé et de plus profond dans les doctrines hindoues, ce qui est une exagération : quelle que soient l’autorité et la portée de ce livre, il ne saurait être mis sur le même rang que les Upanishads ; il ne présente, à vrai dire, qu’un aspect de la doctrine, mais un aspect qui n’en est pas moins digne d’être étudié avec la plus grande attention.
Ce qui nous paraît étrange ici, c’est l’état d’esprit du traducteur, qui commence par déclarer qu’il « s’arrête au seuil du sanctuaire », et qui met à s’avouer « profane » un empressement peu ordinaire. Les idées et leur vérité ne l’intéressent pas, c’est évident ; comment donc a-t-il pu avoir le courage, dans ces conditions, d’entreprendre et de mener à bien un tel travail ? Pour lui, sans doute, ce fut un simple exercice de philologue ; la mentalité de certains « spécialistes » est vraiment déconcertante ! Et n’y a-t-il pas là aussi quelque chose de ce curieux préjugé d’après lequel ceux qui se bornent à envisager une doctrine « de l’extérieur » seraient seuls qualifiés pour l’étudier « scientifiquement » ? Malgré tout, parmi les considérations un peu confuses qui sont rassemblées dans l’introduction, il s’en trouve quelques-unes qui ne manquent pas de justesse : ainsi l’affirmation du caractère « encyclopédique » de l’épopée hindoue, mais encore faudrait-il y ajouter quelques précisions sur la façon dont sont comprises les sciences traditionnelles ; ainsi encore cette remarque que « beaucoup plus que par déductions serrées, la pensée des hindous procède par intuitions et par classifications partielles », qui d’ailleurs ne sont point des classifications à proprement parler, mais bien plutôt ce que nous appellerions volontiers des « correspondances ». Un point intéressant est celui-ci : certains passages de la Bhagavad-Gîtâ peuvent être rattachés aux conceptions du Vêdânta, d’autres à celles du Sânkhya ; pour ceux qui voient là deux « systèmes » plus ou moins rivaux et incompatibles entre eux, un tel fait est inexplicable, à moins de recourir à la théorie de l’« interpolation », qui est la grande ressource de la « critique historique », et que M. Senart, il faut le dire à sa louange, n’hésite pas à qualifier d’« expédient trop commode pour n’être pas d’abord un peu suspect ». Quant à lui, il a tout au moins entrevu qu’il ne s’agit pas de « systèmes », mais bien de « points de vue », et c’est déjà beaucoup ; mais, faute de saisir l’harmonie de ces « points de vue » dans l’unité totale de la doctrine, il a cru se trouver en présence d’une « pensée inconsistante et dispersée », alors que, tout au contraire, ses caractères fondamentaux, ses notes dominantes, si l’on peut dire, sont « concentration » et « identité ».
Quant à la traduction elle-même, elle est sans doute moins agréable à lire que celle de Burnouf, mais elle a, en revanche, le grand avantage d’être plus précise ; Burnouf, en effet, avait eu l’habileté de passer à côté des difficultés et d’éviter beaucoup de contre-sens en restant dans le vague. M. Senart n’a pas seulement mieux rendu certains mots que son prédécesseur avait traduits d’une façon insuffisante ou inexacte ; il a aussi, et avec raison, gardé sous leur forme sanscrite « des termes pour lesquels nous manquent des équivalents, même approximatifs ». On regrettera peut-être qu’il n’ait pas placé à la fin de son ouvrage un lexique contenant l’explication de ces termes ; pourtant, les quelques notes qui se trouvent au bas des pages nous donnent à penser qu’il a mieux fait de s’en abstenir : la philologie et l’interprétation des idées sont deux choses très différentes, et, quand on a pris le parti de s’enfermer dans une « spécialité », c’est agir sagement que de ne plus chercher à en sortir. Les termes sanscrits aideront ceux qui sont au courant des idées hindoues à retrouver le sens exact du texte ; quant aux autres, s’ils ne comprennent pas tout, cela est encore préférable pour eux à l’acquisition de notions fausses ou dénaturées.
- Louis Finot. — Les questions de Milinda
(Milinda-pañha).
Traduit du pâli avec introduction et notes (un vol. in-8o de 166 pp. Collection des Classiques de l’Orient ; Bossard, Paris, 1923).
Ce livre, déjà traduit en anglais par Rhys Davids, se compose d’une série de dialogues entre le roi Milinda et le moine bouddhiste Nâgasena ; Milinda est le roi grec Ménandre, qui régnait à Sâgalâ, dans le Panjab, vers le iie siècle avant l’ère chrétienne ; et il montre bien, dans ses questions, toute la subtilité du caractère grec. La discussion porte sur les points les plus divers de la doctrine bouddhique, parmi lesquels il en est d’importance fort inégale ; mais, dans son ensemble, ce texte est assurément, en son genre, un des plus intéressants qui existent.
Est-ce parce que M. Finot n’a pas été préoccupé cette fois par l’idée qu’il avait à traduire un poème ? Toujours est-il que sa traduction nous a paru plus nette que celle de la Marche à la Lumière ; il y a joint d’ailleurs des notes plus abondantes, et il a eu soin d’indiquer, pour les termes techniques, leurs équivalents pâlis ; nous regrettons seulement qu’il n’ait donné qu’exceptionnellement les formes sanscrites correspondantes.
Dans la même collection, fort bien éditée, nous mentionnerons encore, pour ceux qui s’intéressent au Bouddhisme, deux autres ouvrages : Trois Mystères tibétains, traduits avec introduction, notes et index par Jacques Bacot (1 vol. in-8o de 300 pp., 1921), et Contes et Légendes du Bouddhisme chinois, traduits par Édouard Chavannes, avec préface et vocabulaire par Sylvain Lévi (1 vol. in-8o de 220 pp., 1921). Bien que ces récits aient été présentés avec des intentions purement littéraires, ils ont en réalité, comme d’ailleurs tous ceux du même genre que l’on peut trouver en Orient, une autre portée pour qui sait en pénétrer le symbolisme au lieu de s’arrêter aux formes extérieures, si séduisantes qu’elles puissent être.