Février 1937

— Dans Atlantis (no de novembre), M. paul le cour publie un long article intitulé Église, Maçonnerie, Tradition, dont les intentions « conciliatrices » sont apparemment excellentes, mais qui contient bien des confusions et même des erreurs de fait. L’auteur veut retrouver la dualité fantaisiste Aor-Agni dans le symbolisme des deux colonnes, ce qui l’amène à attribuer une de celles-ci à l’Église et l’autre à la Maçonnerie, alors que, en réalité, elles figurent toutes deux dans la Maçonnerie, et qu’on pourrait peut-être retrouver aussi dans l’Église quelque équivalent du symbole complet (certaines figurations de saint Pierre et de saint Paul, notamment, paraissent pouvoir se prêter à une telle interprétation). D’autre part, les rapports de ce que représentent ces deux colonnes ne sont certainement pas ceux de l’exotérisme et de l’ésotérisme ; et ajoutons que, si l’ésotérisme, dans la tradition chrétienne, est souvent rapporté à l’« Église de saint Jean », l’exotérisme ne l’est jamais à l’« Église de Jésus » (?), mais bien à l’« Église de saint Pierre ». Passons sur une curieuse sortie contre saint Thomas d’Aquin, en qui M. paul le cour veut, bien à tort, voir un « rationaliste », et qu’il rend responsable de « la conception de la nécessité de la force pour appuyer le droit », dont « nous voyons aujourd’hui des applications redoutables »… Les considérations sur l’origine de la Maçonnerie sont bien vagues, et pour cause, et ses relations avec l’Académie platonicienne de Florence sont fort loin d’apparaître clairement ; mais que dire d’une confusion comme celle de l’Écossisme avec la Maçonnerie anglo-saxonne, alors que la première raison d’être de l’Écossisme fut précisément de s’opposer aux tendances protestantes et « orangistes » représentées par cette dernière depuis la Fondation de la Grande Loge d’Angleterre ?

— Dans le Symbolisme (numéro de novembre), Oswald Wirth intitule Spéculatif et opératif ce qui veut être une sorte de réponse à notre article Opératif et spéculatif ; le renversement des termes est sans doute voulu, mais, en dépit de quelques paroles assez aigres à notre adresse, nous n’avons pu arriver à distinguer ce qu’il nous reproche au juste, puisqu’il finit par déclarer qu’« il suffit de s’entendre avec nous sur la portée des termes dont nous usons » ; encore faudrait-il ne pas la rabaisser ou la restreindre d’une façon inacceptable… Quand nous disons que l’initiation comporte essentiellement un élément « surhumain », ou encore qu’il ne peut y avoir aucune initiation sans rites, cela ne saurait laisser place à la moindre équivoque ; il s’agit là de questions « techniques » précises, et non point de vagues considérations plus ou moins « métaphoriques » ou imaginatives. D’autre part, nous n’avons jamais dit que « la Maçonnerie doit redevenir opérative, après s’être intitulée spéculative à titre transitoire » ; nous avons dit, ce qui est bien différent, que la Maçonnerie spéculative représente un amoindrissement et même une dégénérescence par rapport à la Maçonnerie opérative ; nous souhaitons assurément que cette dégénérescence puisse n’être que transitoire, mais, malheureusement, nous ne voyons actuellement rien qui indique qu’elle doive l’être effectivement. — G. Persigout étudie le Cadre initiatique du Cabinet de réflexion ; il parle à ce propos de la catharsis, dont le processus a en effet un rapport évident avec la « descente aux Enfers », et aussi du symbolisme de la « pétrification », dont la connexion avec le sujet apparaît beaucoup moins nettement, malgré la caverne où réside Méduse… — Dans le no de décembre, Oswald Wirth veut marquer une distinction entre La Théosophie et l’Art royal;  mais il a vraiment bien tort de sembler admettre que le théosophisme peut malgré tout représenter quelque chose de réel au point de vue initiatique ! — Albert Lantoine montre que Le Péché originel de la Maçonnerie française a consisté à accepter la démocratie dans sa propre Constitution ; il remarque fort justement que « la démocratie a le souci d’écarter l’élite », et que « la démocratisation ne peut être qu’un facteur dissolvant pour un groupement sélectionné » ; nous ajouterions seulement qu’elle est même en contradiction directe avec le principe de la sélection et avec toute organisation constituée hiérarchiquement. — Un court article sur L’Initiation et l’Évangile, signé « Bardamu », nous paraît impliquer une certaine confusion entre le point de vue initiatique et le point de vue religieux : celui-ci ne peut pas remplacer celui-là ou lui être équivalent, car ni le domaine ni le but ne sont les mêmes ; la « Délivrance » est tout à fait autre chose que le « salut », et ce n’est certainement pas l’obtention de ce dernier qui, dans l’antiquité, était mise en rapport avec la connaissance initiatique.