Notice sur les diverses Sociétés Secrètes américaines
qui ne sont pas officiellement rattachées à la Maçonnerie
(suite)(*)

(Voir La France Antimaçonnique, 26e année, nos 24 et 26,
et 27e année, nos 25 et 28.)

Fils de Saint-Georges

Cette organisation fut formée dans la première moitié du xviiie siècle aux États-Unis, et d’abord dans l’Utah, comme une sorte de contre-partie aux « Molly Maguires ». Elle se compose presque exclusivement d’Anglais ; son but primitif était la protection de ses membres, et, plus récemment, elle y a ajouté certains avantages pécuniaires.

Ordre des Fils de Malte

Cet Ordre est probablement éteint aujourd’hui, du moins aux États-Unis, mais, avant la guerre civile, il était très actif dans presque tous les États du Nord. Ses membres étaient aussi appelés « Frères de la Troupe Maltaise » ; leur mot d’ordre était ‘Tis Well, « c’est bien » (II Rois, IV, 26). Ils faisaient remonter leur Ordre à l’an 1048, revendiquant la même origine que les autres organisations de Malte ; ils considéraient même Publius et le grand apôtre Paul comme en ayant été dans leur temps des membres éminents. Le rituel et les cérémonies de cet Ordre étaient très élastiques, et leur réputation fut surfaite ; cela ayant été connu, il en résulta du discrédit pour l’Ordre, qui s’éteignit assez rapidement. Ses manuels historiques et cérémoniels sont devenus rares ; il en existe des exemplaires datés de 1859.

Ordre de l’Oriole

C’est une organisation particulière au Maryland, et plus spécialement à Baltimore. Ses cérémonies se font avec une grande pompe, et représentent le plus souvent des scènes orientales. Celle du 14 septembre 1882 fut d’une magnificence qui n’a peut-être jamais été égalée ; elle figurait le Râmachandra-Avatâra, d’après le Râmâyana, un des deux grands poèmes épiques de l’Inde (l’autre étant le Mahâbhârata). Quinze tableaux extraits de ce poème, sous le titre « L’Épopée de l’Inde », furent publiés en 1882 pour être distribués par l’Ordre.

Société des Mystiques Orientaux

C’est une société occulte qui comporte une initiation et des degrés. La vraie initiation du Tarot, comprenant les Arcanes Mineurs et Majeurs, est envoyée à chaque membre. Le droit d’admission est de 5 dollars.

L’organe officiel de la Société était autrefois The Philomathian, publié à Union City, Michigan ; depuis 1904, c’est la revue mensuelle Oriental Mysteries, publiée par le Dr T. J. Betiero. Celui-ci est le président de la Société ; le secrétaire est J. P. Dellanso. L’adresse actuelle de la Société est : 1015, Sutter Street, San Francisco, Californie.

Temple de la Rose-Croix

« Les choses qui se manifestent charment nos sens, mais rendent les choses qui ne se manifestent pas difficiles à croire » (Hermès). — « La Porte du Temple de la Rose-Croix, – de Celui à la Grande Âme, à l’Esprit sublime, et au Cœur aimant ». La « Porte du Temple » est à Buckley, Illinois.

Une partie des principes et des aspirations de ces Rosicruciens (qu’il ne faut pas confondre avec la Societas Rosicruciana dont il a été question précédemment) est exposée dans l’ouvrage intitulé : The Soul, its Powers, Migrations and Transmigrations (L’Âme, ses Pouvoirs, Migrations et Transmigrations), par F. B. Dowd ; la première édition est de 1882, la seconde de 1888.

Ordre du S. E. K.

Cet Ordre est un cercle d’étudiants qui se consacrent au symbolisme et à son application aux aspects psychiques de l’homme : « Je pense, donc je suis ». — « Le développement d’un cube est une croix de crucifixion (croix latine)(1). L’étudiant en ésotérisme peut pénétrer le voile. » — Certains des membres de l’Ordre se livrent aussi à l’étude de l’Égyptologie.

Les membres sont peu nombreux et très dispersés. Le chef de l’Ordre réside, croyons-nous, dans le Massachusetts.

Temple d’Isis

Ce Temple est situé à Chicago et est présidé par un Mage. Son symbole est « un Kneph à quatre ailes entouré d’un serpent »(2).

Des conférences hermétiques, dans lesquelles sont traités divers sujets ésotériques, sont faites aux membres deux fois par mois ; elles sont ensuite réunies en volumes, qui sont publiés au prix de 1 dollar 25 cents chacun. Cette Fraternité Hermétique publie également d’autres ouvrages sur les Mystères, le Sphinx, les Pyramides, et les enseignements hermétiques.

Ordre Oriental de l’Humilité

Cet Ordre est quelquefois appelé « Ordre des Fils de l’Humilité » ou « des Novices de l’Humanité » ; il était primitivement désigné sous le nom de « Faneurs Orientaux », à l’époque où son degré suprême fut, dit-on, conféré au roi de Perse.

Le titre du chef de l’Ordre est Suprême Sultan ; ses « édits » doivent être obéis par tous les membres, et les pénalités encourues pour désobéissance au cours des sessions sont exécutées immédiatement.

Cet Ordre est en activité dans la plupart des grandes villes des États-Unis. Sa légende donne un résumé de son histoire.

Fraternité Éthiopienne du Monde

Cette Fraternité est, comme son nom l’indique, destinée aux hommes de couleur ; elle est d’origine toute récente, mais ses promoteurs assurent qu’elle est appelée à devenir « une des plus grandes organisations secrètes du monde ».

Adresse de la Fraternité : chez le Rév. G. W. Browning, 1527, 6th Avenue, Birmingham, Alabama.

Filles de Pénélope

Nous n’avons pu obtenir que très peu d’informations sur cet Ordre féminin. On y enseigne que « la constance est la première des vertus ». Les « Toiles » (c’est ainsi que sont appelés les Ateliers) sont « tissées » en mémoire de l’épouse d’Ulysse.

Cet Ordre paraît, du moins d’après sa dénomination, avoir quelques rapports avec celui du Palladium, dont il a été question précédemment, et dans lequel les membres du grade féminin portent le titre de Compagnes de Pénélope.

Société de la Yoga Aryenne

Cette Société a son siège à Richland Center, Pennsylvanie ; elle est présidée par le Guru Rakadazan, « un Initié de l’Orient » (?). Sa devise est : « Nous croyons en votre Divinité. »

Voici un extrait des déclarations de cette Société : « Nous croyons que la clef du pouvoir mental, spirituel et physique se trouve dans le développement supérieur de l’Âme. En outre de la culture mentale et spirituelle qui découle de ces enseignements, ceux-ci sont d’une grande valeur, pour tous ceux qui s’intéressent à l’évolution et au progrès de la pensée et de la civilisation, puisqu’ils font connaître la prodigieuse culture mentale et éthique des peuples orientaux. Cette Société enseigne la Vie Supérieure, telle qu’elle a été enseignée par les anciens Maîtres Hindous et Persans, avec la signification complète de ces enseignements dans leur exacte interprétation. »

Le sceau de la Société porte à son centre une fleur de lotus, à pétales alternativement blancs et noirs, portant au lieu de pistil une croix ansée (ensemble analogue à celui du linga et de la yoni dans le symbolisme hindou), et se dressant entre les deux lettres OM, transcription du monosyllabe sacré de l’Inde. Le tout est entouré d’un serpent qui, d’après la légende qui l’accompagne, est « le symbole de la Jeunesse et de l’Immortalité ».

Nous trouverons par la suite d’autres sceaux plus ou moins semblables à celui-là par quelques-uns de leurs éléments, sans parler de celui de la Société Théosophique, que nos lecteurs connaissent déjà (voir La France Antimaçonnique, 27e année, no 18, pp. 210-211), et dans lequel figurent également la croix ansée et l’Ouroboros (le serpent qui se mord la queue, symbole d’indéfinité, et non d’éternité comme on le dit souvent à tort.)

Fraternité de Jésus, Ancien Ordre de Melchisédek

Cette Fraternité ne doit pas être confondue avec la Communauté de Jésus dont il a été question précédemment, non plus qu’avec le Cinquième Ordre de Melchizédek et du Sphinx Égyptien. Il est curieux de remarquer combien le nom de Melchissédec a été employé par toutes sortes d’organisations à caractère plus ou moins initiatique ; c’est là un point sur lequel nous aurons sans doute quelques occasions de revenir.

La Fraternité dont il s’agit ici a pour organe une revue mensuelle intitulée Voice of the Magi (La Voix des Mages), qui se publie à Waldron, Arkansas, sous la direction du « Professeur » E. H. Adams, lequel se qualifie de « clairvoyant, voyant et psychomètre ». Cette revue porte en épigraphe la parole de l’Écriture : « Fait Grand-Prêtre à jamais selon l’Ordre de Melchisédek ». L’emblème de l’Ordre, tel que nous le voyons figuré sur la couverture de la revue, est d’une apparence toute maçonnique : c’est un compas ouvert à 45°, placé sur une équerre graduée à branches égales ; à l’intérieur est une étoile à sept pointes (tandis que l’« étoile flamboyante » maçonnique n’en a que cinq), noire avec un cercle blanc au centre.

En réalité, cette Fraternité est une association psychique, ou plutôt spirite ; sous ses auspices fonctionne l’Association des Camp-Meetings de Sion Hill, qui a pour président le Rév. George Tenney, pour vice-président W. T. Wooten, et pour secrétaire E. H. Adams.

Le Suprême Temple de l’Ordre se réunit annuellement, le premier mardi de septembre, à Sion Hill, près Waldron ; les délégués à ces réunions sont « choisis par les Royaumes de Lumière » (?). Dans la liste de ces délégués pour la dernière réunion (septembre 1912), figurent des représentants de 23 États de l’Union (près de la moitié du nombre total des États), ainsi que du Canada, de Porto-Rico, de l’Inde, du Brésil et de l’Afrique Occidentale.

Le Suprême-Maître de l’Ordre est W. T. Wooten ; son Suprême Grand-Prêtre, W. F. Gordon ; son Suprême-Voyant, E. H. Adams, qui est également secrétaire-trésorier et organisateur des réunions, et dont l’adresse est : Lock Box 6, Waldron, Ark. Voici la liste des autres Suprêmes Officiers pour 1912 : Suprême Conseiller, H. C. Stanton ; Suprême Auditeur, F. R. Blackmar ; Suprême Prophète, George Tenney ; Suprême Historien, W. B. Turman ; Suprême Héraut, J. F. Dervage ; Suprême Guide, W. D. Naus ; Suprême Garde, Charles Seudder ; Suprême Sentinelle, J. F. Washburn.

Fraternités et Sororités de la Lettre Grecque

Sous cette dénomination commune sont comprises de multiples associations secrètes, toutes plus ou moins reliées entre elles, et dont chacune se désigne par une ou plusieurs lettres grecques ; leurs branches sont appelées Chapitres. Ces associations recrutent leurs membres dans les Universités et les Écoles supérieures américaines ; les Fraternités sont pour les étudiants, les Sororités pour les étudiantes.

Il a été assez longuement question de ces organisations, récemment et à diverses reprises, dans la Revue Internationale des Sociétés Secrètes, (nos du 15 décembre 1912, pp. 1299-1301 ; du 15 février 1913, pp. 390-394 ; du 20 mars, pp. 711-714 ; du 20 avril, pp. 1115-1119 et 1283 ; du 20 mai, p. 1605).

D’après cette revue, les associations en question, dont quelques-unes sont assez anciennes, se rattachent étroitement à la Maçonnerie. Leur existence est particulièrement menacée en ce moment par les autorités universitaires : dans diverses Écoles, de nombreux étudiants faisant partie des Fraternités ont déjà été suspendus, et d’autres ont été mis en demeure d’opter entre la démission de membres des Fraternités et l’expulsion de l’École dont ils font partie. La crise serait même arrivée à un état si aigu que l’opinion publique commence à s’en inquiéter.

On évalue à plus de 9 millions de dollars (environ 46 millions de francs) les immeubles que possèdent les Fraternités de la Lettre Grecque. Cette fortune est répartie entre 31 des 36 Fraternités américaines, qui ont à elles toutes 1141 Chapitres ; le nombre des édifices leur appartenant est de 513, leur valeur moyenne est de 100.000 francs environ (d’après Baird, Manual of American College Fraternities, septembre 1912). L’accroissement de la fortune des Fraternités et Sororités par de riches et fréquentes donations serait une des causes pour lesquelles la suppression de ces associations a été décidée par les trustees ou administrateurs de la fortune de l’Université. On reproche en outre à ces sociétés d’avoir un caractère antidémocratique, de tenir, en dehors des Écoles, des réunions qui ne sont soumises à aucun contrôle, et de n’être d’aucun avantage pour les études.

En présence de la situation actuelle, on a été amené, paraît-il, à envisager la possibilité d’une solution qui serait une transition : les Sociétés de la Lettre Grecque cesseraient d’admettre de nouveaux membres à partir de 1916, d’où résulterait l’extinction naturelle des Fraternités.

Fraternité de l’Acacia

Cette Fraternité possède, comme les précédentes, des Chapitres dans les différentes Universités américaines ; mais elle a la particularité de n’admettre que des Maçons parmi ses membres, qui se recrutent à la fois parmi le personnel enseignant et parmi les étudiants. Il ne semble pas que cette organisation soit atteinte par les mesures prohibitives qui frappent actuellement les autres sociétés secrètes universitaires dont nous venons de parler.

Ordre de l’Amarante

C’est un Ordre féminin, superposé, à la façon d’un système de hauts grades, à l’Ordre de l’Étoile de l’Est, dont il a été question précédemment. Ses Ateliers sont appelés Cours ; ses membres se recrutent exclusivement dans les Chapitres de l’Étoile de l’Est.

Chevaliers de Luther

La Revue Internationale des Sociétés Secrètes (no du 20 avril 1913, pp. 1108-1109) donne sur cette société quelques détails empruntés à l’organe du Synode Évangélique Luthérien de l’Iowa.

Malgré le nom des Chevaliers de Luther, les fondateurs de cette société ne sont point des Luthériens ; le secrétaire, qui est actuellement occupé à la rédaction d’un rituel, est un juif, nommé S. L. Seemann. Les officiers de cette organisation nouvelle sont encore en quête d’un pasteur luthérien qui consente à accepter le titre de Most High Spiritual Advisor (Très Haut Conseiller Spirituel).

Les Ateliers locaux s’appelleront des Châteaux ; le Grand Château, c’est-à-dire le pouvoir central, sera situé à Desmoines, Iowa.

(À suivre.)