Octobre 1936

Gabriel Beauchesne, Paris.

Ce que nous avons dit ici dernièrement(*), à propos de La Guerre occulte dont M. Léon de Poncins est aussi l’un des auteurs, quant à certaines exagérations concernant le rôle des Juifs dans le monde, et quant à la nécessité de faire en tout cas certaines distinctions, s’applique encore à ce nouveau volume. Il y a assurément beaucoup de vrai dans ce qui y est exposé au sujet de deux « Internationales », l’une révolutionnaire et l’autre financière, qui sont sans doute beaucoup moins opposées réellement que ne pourrait le croire l’observateur superficiel ; mais tout cela, qui fait d’ailleurs partie d’un ensemble beaucoup plus vaste, est-il vraiment sous la direction des Juifs (il faudrait dire plutôt de certains Juifs), ou n’est-il pas utilisé en réalité par « quelque chose » qui les dépasse ? Il y aurait du reste, pensons-nous, une étude bien curieuse à faire sur les raisons pour lesquelles le Juif, quand il est infidèle à sa tradition, devient plus facilement qu’un autre l’instrument des « influences » qui président à la déviation moderne ; ce serait là, en quelque sorte, l’envers de la « mission des Juifs », et cela pourrait peut-être mener assez loin… L’auteur a tout à fait raison de parler d’une « conspiration du silence » à l’égard de certaines questions ; mais que serait-ce s’il lui arrivait de toucher directement à des choses beaucoup plus vraiment « mystérieuses » encore, et auxquelles, disons-le en passant, les publications « anti-judéo-maçonniques » sont les premières à bien se garder de faire jamais la moindre allusion ?

Fédération Nationale Catholique, Paris.

Le contenu de ce livre avait paru précédemment sous la forme d’une série d’articles dans la R. I. S. S. ; c’est assez dire dans quel esprit il a été conçu… Assurément, les documents qui y sont publiés, et dont l’essentiel est constitué par la correspondance de Willermoz au cours des négociations longues et compliquées qui devaient finalement aboutir à la constitution du Directoire Écossais Rectifié de la Province d’Auvergne, ces documents, disons-nous, gardent toujours en eux-mêmes leur intérêt historique ; mais que dire des commentaires dont on a jugé bon de les accompagner ? Il est des invraisemblances tellement énormes qu’elles en deviennent comiques ; c’est bien le cas de la présentation de Willermoz et de certains autres personnages (parmi lesquels les chanoines lyonnais d’alors sont plus particulièrement maltraités) comme des serviteurs du « culte du démon » et des gens qui conspiraient pour amener un « retour au paganisme » ! Nous ne sommes certes pas de ceux qui sont disposés à nier « l’intervention du démon dans les choses de ce monde », bien au contraire ; mais qu’on la cherche où elle est réellement ; il est vrai que ce serait un peu plus difficile et plus dangereux que de suivre tout simplement les fausses pistes sur lesquelles ledit démon ou certains de ses représentants ont estimé avantageux de lancer les « chercheurs » plus ou moins naïfs, pour empêcher précisément qu’ils ne risquent de découvrir la vérité…

H.-G. Peyre, Paris.

Il ne s’agit pas, comme on pourrait être tenté de le croire, de la fameuse « affaire du Collier », mais d’une histoire toute fictive, où l’on voit bien apparaître un certain nombre de personnages réels, mais où ceux qui tiennent les principaux rôles sont, eux aussi, purement imaginaires. Ce n’est en somme, ainsi que le sous-titre l’indique d’ailleurs assez clairement, qu’une sorte de roman antimaçonnique, qui se distingue surtout par le caractère « anachronique » de certains discours : le langage pourrait en être celui de quelques Maçons politiciens d’aujourd’hui, mais il n’est sûrement pas celui de Maçons du xviiie siècle ! Il y a aussi une bizarre histoire de « sept Templiers initiés ou spéculatifs » (sic), qui se seraient perpétués après la destruction de leur Ordre, et dont le chef serait désigné comme le « Maître du Secret » ; ils auraient rompu toutes relations avec les autres Templiers survivants, qui, eux, auraient fondé la Maçonnerie pour poursuivre leur vengeance ; l’auteur (à qui nous signalerons incidemment à ce propos une grosse erreur en ce qui concerne le symbolisme templier du nombre 11, dont nous avons parlé dans L’Ésotérisme de Dante) serait probablement bien en peine de justifier quelque peu sérieusement toutes ces assertions…

Traduction française de J. Salève (Éditions Eugène Figuière, Paris).

L’auteur de ce petit volume s’est apparemment proposé d’« adapter » certains enseignements du Jaïnisme aux cadres de la psychologie occidentale ; mais la forme en est si maladroite et l’expression si défectueuse que, bien souvent, on ne sait trop ce qu’il a voulu dire. Nous ne pouvons d’ailleurs déterminer quelles sont au juste, en cela, les parts respectives de responsabilité de l’auteur et du traducteur ; en tout cas, il nous semble que ce dernier aurait pu tout au moins se donner la peine d’éviter les barbarismes et de construire ses phrases correctement !

« The Shanti-Sadan Publishing Committee », London.

Cette brochure contient la traduction de quelques entretiens du guru de l’auteur sur divers sujets se rapportant aux enseignements du Vêdânta, notamment en ce qui concerne les moyens préparatoires de la réalisation spirituelle ; la forme en est simple et le contenu assez élémentaire, mais il n’y a là rien qui puisse soulever de sérieuses objections. Nous relèverons seulement une assertion qui nous paraît quelque peu contestable : comment et en quel sens peut-on attribuer à Zoroastre l’origine du Karma-Yoga ?

Association de la Science Spirituelle, Paris.

Ce volume, comme ceux qui l’ont précédé, représente l’édition d’une série de conférences, faites cette fois à Dornach en 1922-1923, et où l’« histoire des idées » est traitée d’une façon bien spéciale à l’auteur. Il est certain que le développement des sciences modernes est étroitement lié à la formation d’une certaine mentalité, très différente de celle des époques précédentes ; mais la nature réelle du changement qui s’est produit ainsi au cours des derniers siècles n’est peut-être pas précisément celle qui est décrite ici, et les vues concernant le mode de connaissance des anciens rappellent un peu trop les fantaisies des « clairvoyants » pour qu’on puisse volontiers les prendre au sérieux.

Rédaction de la revue Jitno Zerno, Sofia.

Les paroles de ce « Maître » bulgare sont, dans leur ensemble, d’une désolante banalité ; si nous les mentionnons cependant, c’est qu’on y rencontre la description d’une « Auguste Fraternité Universelle » dont la constitution ressemble terriblement à celle de la fameuse « Grande Loge Blanche » ; les histoires de ce genre se multiplient décidément un peu trop, depuis quelque temps, pour qu’on puisse s’empêcher d’y voir un symptôme véritablement inquiétant !