L’ARCHÉOMÈTRE
(suite)(*)

Nous devons maintenant considérer dans son ensemble le premier verset de la Genèse :

בראשית ברא אלהים
את השמים ואת הארץ ׃

Ce verset se compose de sept mots, de sorte que nous trouvons tout d’abord ici le Septénaire, nombre qui, comme nous l’avons dit précédemment, représente les Forces de la Nature, principiellement synthétisées dans les Elohim(263), quant à leur essence spirituelle, et exerçant leur action sur le principe substantiel au sein duquel s’accomplit la détermination potentielle qui constitue la Création(264), l’opération initiale de l’Organisation Cosmique.

D’autre part, le nombre total des lettres composant ces sept mots est de 28 (= 4 × 7), nombre qui se rapporte à la durée du mois lunaire(265), ce qui rattache l’« actuation » formatrice (déterminée en principe par la Création)(266) au Cycle qui précède immédiatement le nôtre dans l’ordre causal (de dépendance logique, non de succession chronologique) de la manifestation universelle, et qui, par rapport au Cycle actuel, est représenté symboliquement comme le Monde de la Lune(267). Il faut aussi remarquer le rapport de ce nombre lunaire 28 avec la lettre initiale ב, qui est précisément la planétaire de la Lune.

On voit en outre que le verset considéré peut, suivant la disposition ci-dessus, se partager exactement en deux moitiés, comprenant respectivement, la première trois mots, composés de 6 + 3 + 5 = 14 lettres, et la seconde quatre mots, composés de 2 + 5 + 3 + 4 = 14 lettres également. Cette division montre la décomposition du Septénaire en un Ternaire supérieur, exprimant l’action essentielle des Forces créatrices, et un Quaternaire inférieur, désignant la réalisation substantielle qui y correspond(268) ; elle est d’ailleurs indiquée ici par le sens, en même temps que par le nombre des lettres, qui est égal de part et d’autre. Nous aurons à revenir sur ce nombre 14, en étudiant le nom אלהים ; pour le moment, nous nous bornerons à faire remarquer qu’il représente le rang alphabétique de la lettre נ, planétaire du Soleil, dont la signification hiéroglyphique se rapporte à l’idée de rénovation, appliquée ici à la manifestation de chaque Cycle relativement au précédent(269).

Ce nombre 14 se réduit à 1 + 4 = 5, de même que le nombre 203, qui, comme nous l’avons vu, est la valeur totale des trois lettres ברא, composant le second mot du verset, en même temps que la première moitié du premier mot בראשית(270).

Le nombre total des lettres, 28, se réduit de même à 2 + 8 = 10, valeur numérique de la lettre י, qui représente la Puissance Universelle(271), contenant toutes choses dans leur détermination principielle, en essence et en substance ; et le même nombre 10 est donné également par réduction de la somme des valeurs numériques des quatre lettres du mot בריה, « Création »(272) :

ב = 2
ר = 200
י = 10
ה = 5
217

Ce nombre 217 se réduit, en effet, à 2 + 1 + 7 = 10, et le Dénaire correspond ici au développement complet de l’Unité principielle(273). D’ailleurs, en remplaçant dans le même total chaque chiffre par la lettre hébraïque correspondante, on obtient באז, signifiant les Forces en action (potentielle) dans l’expansion de l’Unité primordiale, expansion quaternaire qui, en principe, implique le Dénaire(274).

Nous pouvons encore partager le nombre 217 en deux parties, auxquelles nous ferons correspondre les lettres dont elles marquent les rangs alphabétiques respectifs, et cela de deux façons différentes : d’une part, 2 et 17, soit ב, représentant le principe passif et substantiel de la Création, et פ, zodiacale du Verbe ; d’autre part, 21 et 7, soit ש, planétaire du Verbe, et ז, représentant le principe actif et essentiel de la Création ; il faut remarquer la symétrie analogique et le complémentarisme de cette double correspondance.

Revenons maintenant au verset partagé en ses deux moitiés : au point de vue du nombre des lettres, on peut encore diviser chacune de celles-ci en deux septénaires, ce qui fait naturellement quatre septénaires pour l’ensemble. Le premier septénaire comprend le mot בראשית, plus la lettre ב, première du mot ברא, de sorte qu’il commence et finit par cette même lettre ב. Le second septénaire comprend les deux dernières lettres du mot ברא, plus le mot אלהים ; on y trouve ainsi le mot , nom égyptien du Soleil(275), uni au nom des Elohim. Le troisième septénaire comprend les deux mots את השמים ; et, enfin, le quatrième comprend les deux mots ואת הארץ.

Dans l’ensemble du verset, considéré comme septénaire quant au nombre des mots, la première partie, c’est-à-dire le Ternaire supérieur, désigne à la fois Ce qui crée et l’acte créateur, car l’Agent (en tant que tel) et l’acte (impliquant d’ailleurs ce sur quoi il s’accomplit) ne peuvent pas être envisagés séparément l’un de l’autre ; la seconde partie, c’est-à-dire le Quaternaire inférieur, désigne ce qui est créé, le résultat de la Création ou son produit, sous l’aspect de la distinction principielle des Cieux, ensemble des possibilités informelles, et de la Terre, ensemble des possibilités formelles, distinction que nous aurons à considérer avec plus de détails par la suite.

Quant à la première partie du verset, nous en avons déjà étudié le premier mot, בראשית, et nous avons vu que sa formation archéométrique se partage en deux phases(276), dont la première se reproduit ensuite pour donner naissance au second mot, ברא « Il créa », verbe exprimant l’acte de détermination principielle et potentielle, suivant l’interprétation de Fabre d’Olivet.

Nous ne reviendrons pas sur la valeur numérique de ce mot ברא, puisque nous avons déjà eu à l’étudier sous ce rapport, en le regardant comme la première moitié du mot בראשית(277).

En intervertissant les deux premières lettres de ברא, on obtient רבא, qui signifie la Maîtrise spirituelle(278) ; cette interversion équivaut à remplacer, dans la formation archéométrique du mot considéré, le mouvement ascendant par un mouvement descendant, ainsi qu’on peut s’en rendre compte immédiatement en se reportant à la figure qui indique la formation du mot בראשית(279).

Suivant ce que nous avons vu en partageant la première moitié du verset en deux septénaires de lettres, on peut encore considérer le mot ברא comme formé de ב, lettre de la Lune, et רא, nom du Soleil ; ainsi, les deux éléments complémentaires masculin et féminin s’y trouvent réunis, mais l’élément féminin y figure le premier, ce qui s’explique, comme nous l’avons déjà indiqué dans tout ce qui précède, par le rôle cosmogonique de la Vierge Céleste.

Le verbe ברא a pour sujet le troisième mot, אלהים, et, bien que celui-ci soit un pluriel, ce verbe est au singulier, cela parce que אלהים est un nom collectif ; c’est pourquoi Fabre d’Olivet, l’envisageant à ce point de vue, le traduit par « Lui-les-Dieux », et c’est ce nom que nous allons maintenant avoir à étudier.

Mais, auparavant, nous considérerons encore la somme des valeurs numériques totales des deux premiers mots : 913 + 203 = 1116 ; ce nombre montre la Tri-Unité envisagée sous le point de vue distinctif, puis le Sénaire qui, par réflexion, résulte de ce point de vue, et qui est en même temps, par là même, le nombre caractéristique de la Création(280).

Les deux moitiés de ce nombre (qui sont aussi les nombres formés respectivement par les deux chiffres centraux et par les deux chiffres extrêmes), 11 et 16, sont les rangs alphabétiques des lettres כ et ע, dont l’ensemble désigne la Force Spirituelle en action involutive.

Enfin, 1116 se réduit à 1 + 1 + 1 + 6 = 9, nombre de la lettre ט(281), que nous retrouverons encore par la suite, et qui désigne ici l’enveloppement (circulaire ou sphérique), dans la détermination potentielle primordiale de l’Œuf du Monde, des principes élémentaires constituant les germes organiques de la manifestation cyclique universelle.

(À suivre.)